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LES ÉTATS-UNIS
PUISSANCE COLONIALE

L’infortuné M. Mac-Kinley, qui, à peine réélu, est mort si tragiquement, n’était point un des présidens les plus remarquables qu’aient eus les États-Unis. Bon professionnel de la politique, homme de parti fidèle, appliqué d’ailleurs et bienveillant, assez effacé pour ne guère porter d’ombrage autour de lui, il avait dû à ces qualités un peu négatives sa fortune politique. Dans le poste élevé où elle l’avait porté, il s’était occupé plutôt de suivre que de guider l’opinion ; loin d’imiter son prédécesseur, le président Cleveland, et de se servir des pouvoirs si considérables dont il était muni pour mettre un frein aux entraînemens, fût-ce à ceux de son propre parti, il s’était considéré comme le délégué de ce parti au pouvoir et s’était toujours efforcé de conformer ses vues aux siennes. Ce personnage assez modeste vivra pourtant dans l’histoire, et ce n’est pas seulement à sa mort tragique qu’il le devra. Déjà familier à ses contemporains par le fameux tarif ultra-protectionniste dont il fut le parrain, sinon le principal auteur, le nom de William Mac-Kinley sera peut-être à peine moins connu des générations futures que ceux de ses plus illustres prédécesseurs, de Washington ou de Lincoln. C’est qu’il restera attaché aux grands événemens accomplis sous la présidence de celui qui le portail. Or, il n’y a rien eu de plus mémorable dans l’histoire des États-Unis que l’orientation politique nouvelle, déterminée par la guerre avec l’Espagne, qui les a fait sortir du continent américain pour les lancer dans la