pour parer, avec la subvention, au total des dépenses ; mais elles restent en deçà de ce chiffre, sauf les années d’Exposition universelle. L’Opéra, depuis vingt-cinq ans, ne se soutient que par les Expositions. Les « privilèges, » suivant le terme usité et parfois ironique, qui n’ont pas eu la chance d’englober cette ressource exceptionnelle, se sont soldés par de grosses pertes. Le dernier en date, depuis son début en 1893 jusqu’au 1er mai 1900, accusait un déficit de 400 000 francs. Seulement l’Exposition allait s’ouvrir et l’apport journalier du public qui, de juin à septembre 1899, ne montait qu’à 350 000 francs, s’éleva, pendant les mois correspondans de 1900, à 1 206 000 francs. L’affluence des étrangers, en permettant de réaliser 600 000 francs de bénéfice, laissa finalement un profit de 200 000 francs pour les huit années écoulées ; lequel, même en y joignant la location des loges sur la scène, que le cahier des charges concède au directeur, n’a rien d’excessif, eu égard au capital aventuré.
Cet élément étranger est si nécessaire à l’Opéra, que l’on a attribué la baisse des recettes, dans les derniers exercices, à l’ouverture plus précoce qu’autrefois de la saison de Londres et à la création de trains de luxe entre le Nord de l’Europe et le littoral méditerranéen, qui réduit le trajet pour les voyageurs allemands et russes, mais ne les oblige plus à traverser Paris où ils s’arrêtaient quelques jours. Plusieurs fois, depuis 1875, lorsque l’Opéra s’est trouvé en présence de ressources insuffisantes, on haussa les tarifs : le maximum, qui était de 12 000 francs à la rue Le Peletier, arriva ainsi à près du double. Maris la dernière tentative, sur laquelle on comptait pour faire rendre à l’abonnement 120 000 de plus, n’a produit que 20 000 francs. Du moment qu’il ne trouvait plus davantage à louer sa place à l’année, l’amateur de musique préféra la prendre au bureau. Il est vrai que l’espèce mélomane est prodigieusement rare parmi les abonnés ; sans quoi, au lieu d’une légère hausse, on aurait eu à enregistrer une forte baisse.
L’abonnement à l’Opéra, c’est surtout un luxe « bien porté » et de bon aloi ; pour quelques-uns une dignité, presque une fonction sociale ; pour tous, l’indice d’un train de vie élégant ou opulent, une chose difficile à obtenir et partant précieuse, dont on ne se dessaisit pas lorsqu’on la possède ; si bien que des « titulaires, » frappés par des revers de fortune et incapables de jouir de leurs loges, les sous-louent pendant vingt ans de suite, mais