avait de sérieuses raisons pour cela. Mais cet ordre de considérations n’est pas le seul qui ait impressionné l’assemblée. Elle a vu d’autres inconvéniens de la politique dans laquelle on cherchait à l’engager, tels que ceux qu’indique la déclaration de M. de Limbourg-Stirum, et qu’avaient déjà mis en évidence les travaux d’économistes comme Cohn, Ulrich, Dehn, Wagner, etc. Ces objections, que nous allons passer en revue, paraissent d’autant plus dignes d’un examen attentif que la plupart ont une portée absolument générale.
Au point de vue social, les avantages que les voies navigables procurent, aux frais du Trésor public, c’est-à-dire de tous les contribuables, ne s’adressent qu’à un petit nombre d’intéressés, auxquels ils constituent un véritable privilège. Il n’existe de voies navigables que dans certaines régions de l’Allemagne : une grande partie du pays en restera toujours dépourvue, à cause de ses conditions topographiques, et cette partie est précisément la plus pauvre, tandis que les régions pourvues de voies navigables sont aussi celles que la nature a le plus favorisées à tous les points de vue : telles sont, par exemple, les vallées du Rhin et de l’Elbe avec leurs riches cités et leurs territoires fertiles. Pendant que ces régions bénéficient des dépenses considérables que l’Etat consacre à la navigation, les contrées pauvres sont obligées de recourir presque exclusivement aux chemins de fer, sur lesquels on paie des tarifs qui représentent non seulement les frais d’entretien et d’exploitation, ainsi que l’intérêt et l’amortissement du capital, mais encore un impôt au profit de l’État.
De plus, les voies navigables profitent surtout aux grandes villes et peu aux petites localités et aux campagnes. La cause en est surtout dans la capacité toujours croissante des bateaux, qui atteint maintenant 2 100 tonnes sur le Rhin et 1 100 tonnes sur l’Elbe. Des expéditions d’un pareil tonnage ne peuvent guère se faire que vers de grandes villes où il existe des industries importantes et où le batelier trouve sûrement un fret de retour. En outre, les transports de la campagne se font surtout à petite distance, et nous avons vu que la navigation délaisse ce genre de trafic.