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présent le jeu ne vaudra pas la chandelle. Paix ou guerre, ma chère Marmotte, je vous aimerai toujours de tout mon cœur. »


N’ayant pu réussir à provoquer trois ans plus tôt une paix qui fût honorable, Voltaire accueillit avec enthousiasme les préliminaires qui devaient aboutir, le 10 février 1763, à la signature définitive. Nous perdions le Canada, la Nouvelle-Ecosse, les îles du Saint-Laurent, le Sénégal, Minorque et une partie des Petites Antilles ; nous devions évacuer l’Allemagne et raser les fortifications de Dunkerque. Il nous était interdit d’armer nos possessions de l’Inde ; enfin il nous fallait céder la Louisiane à l’Espagne en dédommagement de Minorque prise par les Anglais. Ainsi cette paix, conclue par le traité de Paris, et dont se réjouissait Voltaire d’accord avec beaucoup d’esprits de son temps, terminait honteusement une guerre longue, inutile et ruineuse, imposée au Roi par une orgueilleuse maîtresse, et prolongée par l’aveugle incapacité des ministres ; elle consacrait notre ruine comme puissance coloniale ; et elle élevait enfin l’Angleterre à un point de grandeur dont elle ne devait un moment déchoir, au début du XIXe siècle, que pour y remonter presque aussitôt et le dépasser encore de nos jours.


PIERRE CALMETTES.