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merci. Les ambassadeurs purent se vanter d’avoir rempli les vues de la cour de France ; l’Empereur était sauvé pari leur entremise ; la cause catholique avait, désormais, tous les atouts dans la main.

Les ambassadeurs se hâtèrent d’annoncer ces bonnes nouvelles à Paris. Mais le traité d’Ulm était à peine signé, le 3 juillet 1620, qu’ils virent se développer, sous leurs yeux surpris, ses funestes conséquences.


Dès le 5 juillet, Maximilien, se sentant en sûreté pour ses États et n’ayant plus rien à craindre des protestans d’Allemagne, se mit en marche à la tête de l’armée admirablement exercée qu’il avait préparée avec Tilly et il se porta au secours de l’Empereur. Un mouvement général d’offensive des forces impériales se dessine alors. Le roi d’Espagne, qui avait hésité à intervenir, donne l’ordre à Spinola de quitter Bruxelles avec une armée de 25 000 hommes parfaitement organisée et d’envahir le Bas-Palatinat. L’électeur de Saxe, quoique protestant, pénètre en Bohême par la Lusace dont il comptait s’emparer pour arrondir ses États. Bethlen Gabor, craignant, à ce qu’il semble, une intervention polonaise, vient de signer un armistice, et sa défection a contraint le comte de Thurn d’abandonner Vienne et de se replier sur la Bohême. Mansfeld, lui-même, reste neutre à Pilsen, attendant les événemens. Maximilien fait alors sa jonction avec le comte de Bucquoy et tous deux, disposant d’une armée de 50 000 hommes, s’avancent sur le Palatin, réduit à ses seules forces en Bohême.

Les ambassadeurs de France, un peu inquiets du succès si rapide de leur intervention, quittent Ulm en hâte pour se rendre à Vienne. Ils n’ont pas oublié que leur mission est de devenir, en Allemagne, les arbitres de la paix. Ils ont désarmé les protestans ; ils veulent obtenir le même avantage auprès des Impériaux. Mais ils s’aperçoivent bientôt qu’on ne les écoute plus ; on les tient à l’écart ; on les traite en suspects ; on craint d’éveiller les susceptibilités de l’ambassadeur d’Espagne. Laissons-les parler : « Dès lors, nous commençâmes à connaître que l’on nous avait dit vrai, étant certain que l’ambassadeur d’Espagne est si puissant dans les conseils de cette Cour qu’il ne s’y agit plus que par ses seuils avis, pour ne pas dire par ses ordres (7 août 1620). » C’est que, en effet, l’Espagne agit, tandis que la France parle.

Au moment même où les ambassadeurs écrivent cette lettre,