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et la cathédrale d’Orvieto, en attendant qu’il pût achever, au Palais pontifical, dans la chapelle de Nicolas V, l’admirable série des Légendes de saint Etienne et de saint Laurent (1450), l’œuvre d’Italie avec laquelle l’œuvre de Fouquet présente les rapports les plus frappans.

A quelle époque, précisément, Fouquet revint-il en France ? Un acte de 1448, à Tours, constatant l’acquisition du petit domaine, sur la paroisse de l’Ecrignole, où il devait vivre et mourir, semble avoir été signé non par lui, mais par son père. C’est en 1461 seulement que nous l’y trouvons, par pièce authentique, installé depuis quelques années sans doute, car il est déjà peintre du roi. A la mort de Charles VII (22 juillet), on lui apporte de Bourges l’effigie funéraire du défunt. Quelques semaines après (24 septembre), les échevins de Tours lui règlent ses honoraires pour avoir préparé, avec Chouain, architecte, et Hannes, sculpteur, « certains devis de chafauds, mistères et farces à la venue et entrée nouvelle du roy nostre Sire. » Fouquet, Houain, Hannes en furent d’ailleurs, cette fois, pour leurs frais d’imagination, dessins et maquettes. Louis XI, homme sérieux, positif, économe, fit prier, au dernier moment, les Tourangeaux de s’épargner toutes ces mises en scène, « parce qu’il n’y prenait nul plaisir. »

Dès lors, le bon Fouquet, modeste et laborieux, vit en famille, dans l’immeuble acquis en 1448. Le petit domaine se compose d’une maison avec jardin, sur la rue des Pucelles, au bas des remparts, entre deux vieilles tours, la tour Foubert et la tour des Pucelles. Cette dernière, à laquelle on accède du jardin, par un portail bâti au-dessus d’une ruelle, appartient au peintre. C’est là, sans doute, qu’étaient ses ateliers ; il y pouvait travailler en paix, dans la solitude, ses fenêtres ouvertes sur la campagne. La ruelle existe encore ainsi que la tour Foubert, et, depuis ce temps, s’appelle la rue des Foucquets. La tour des Pucelles est tombée, mais son puits se retrouve dans la cave de la maison n° 1. Le logis devait ressembler à tous ceux du même temps qui égaient encore, plus ou moins mutilés, ce vieux quartier : murailles de briques rouges et noires, piliers, portails, frontons, lucarnes en pierre blanche de Bourré moulurée et sculptée, hautes toitures de fine ardoise ; le peintre, sans doute, nous l’a montré plus d’une fois dans ses miniatures. Il y vécut une vingtaine d’années. Un acte nous apprend que sa femme était veuve