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Jehan de Mehun, et la main de Fouquet ne sauraient dire, escrire, ni peindre. » C’est, en 1503 et 1504, Jehan Le Maire de Belges, historiographe prolixe et poète ampoulé, factotum bourdonnant de Marguerite d’Autriche, chargé de ses rapports avec les artistes, qui cite deux fois Fouquet avec admiration. Dans la Plainte du Désiré ou Déploration. du Trépas de Mgr Loys de Luxembourg, on entend la Peinture et la Sculpture, « deux claires nymphes, ses plus privées damoiselles et pédisséques, » en compagnie de dame Nature, pleurant « sur ce noble corps gisant mort tout de frais estendu sur un lit de camp, » faire l’éloge des peintres qu’il admirait ; ce sont, en Italie, Léonard, Gentil Bellin, Pérusin ; dans les Flandres, Roger (Van der Weyden), Hugues de Gand (Van der Goes), Joannes « qui tant fut élégant » (Memling) ; en France, avec Marmion, « jadis de Valenciennes, » notre Fouquet, « qui tant gloires eut siennes, » Poyet (de Tours, peintre d’Anne de Bretagne), Jehan Hay (Simon Hayeneuve du Mans, architecte et dessinateur), Jehan de Paris (Jehan Perréal, l’artiste le plus célèbre et le plus occupé de France, sous Charles VIII et Louis XII). Dans la Couronne margaritique, même éloge de Fouquet, « en qui tout los s’emploie, » le premier des artistes appelés à tresser des fleurs pour Marguerite d’Autriche. Un peu plus tard, Jean Pèlerin, dit le Viator, chanoine de Toul, en son traité De Artificiali Perspectiva, dans un pôle-môle de peintres illustres, cite Fouquet, avec Berthelemi (Barthélémy Clerc, peintre du roi René), Copin (Coppin Delft, peintre de Louis XI), Colin d’Amyens (dessinateur du tombeau de Louis XI à Cléry), à côté de Mantegna, Pérugin, Léonard. Au XVIe siècle, Brèche, dans son Histoire de Tours, rappelle que Fouquet eut deux fils, peintres comme lui. Et puis, c’est tout. Ensuite, comme sur toutes nos gloires du Moyen Age, sacrifiées aux engouemens ultramontains, pendant trois siècles, la nuit tombe sur son nom. Ainsi, sans le souvenir de trois lettrés italiens, sans l’heureux hasard d’une note du bibliothécaire Robertet, désignant l’illustrateur des Antiquités judaïques, nous en serions réduits pour Fouquet, comme pour tant d’autres aussi célèbres de leur temps, Perréal, Marmion, Coppin Delft, à d’incertaines recherches et à une ignorance anxieuse.

Ce qui reste bien acquis, d’abord, c’est qu’il est Tourangeau, Tourangeau de race, de naissance, de tempérament, de séjour, d’habitudes. Les Fouquet sont encore innombrables dans la