comme l’on sait, sont engendrés toutes les fois que les rayons de Röntgen (rayons X) frappent un corps qu’ils ne traversent pas trop aisément : eux-mêmes sont très pénétrans.
D’autre part, il est permis de regarder les rayons X comme très répandus dans la nature. M. Nodon a montré, il y a quelques mois, que ces rayons pouvaient se former directement dans l’air, en dehors du vide de Crookes, par le seul passage des radiations ultra-violettes dans un champ électrique. Ce sont là des circonstances très communes. On peut donc admettre que l’espace et tous les corps ambians sont traversés par des rayons secondaires, c’est-à-dire par un rayonnement identique à celui de Röntgen, mais d’une puissance de pénétration beaucoup plus grande. Telle est la manière de voir, à laquelle l’assentiment de P. et S. Curie donne une très grande autorité. Ce rayonnement pénétrant, universel, serait absorbé facilement par les composés des corps à gros atomes, tels que l’uranium, le thorium et les métaux nouveaux[1].
Voici donc qu’en l’espace de cinq années, on a parcouru un assez long chemin dans la voie de la généralisation du fait de la radioactivité. On est parti de l’idée d’une propriété spécifique de l’uranium, et l’on arrive à la supposition d’un phénomène naturel presque universel. Il est juste de rappeler que ce résultat avait été prédit, avec une perspicacité prophétique, par G. Le Bon. Depuis le début, ce savant s’est efforcé de démontrer que l’action de la lumière, certaines réactions chimiques, par exemple l’hydratation du sulfate de quinine, et enfin les oscillations électriques, provoquaient la manifestation de ce mode particulier d’énergie. M. P. de Heen (de Liège) a défendu la même idée qui, comme on le voit, n’est pas loin de s’imposer.
On voit, en conséquence, que si l’on avait à baptiser aujourd’hui le rayonnement nouveau, ce n’est plus rayonnement uranique qu’il faudrait l’appeler. Le nom est beaucoup trop particulier ; peut-être même est-il illégitime. Ce n’est pas, en effet, une des moindres curiosités des études poursuivies depuis quelques années, d’avoir abouti à ce résultat : que l’on peut dépouiller, presque entièrement, les sels d’uranium de leur radio-activité. En mêlant du chlorure de baryum à la solution, et en précipitant par l’acide sulfurique, on fait passer, en partie, la propriété rayonnante du composé uranique au précipité
- ↑ M. Villard a montré que le bismuth lui-même (gros poids atomique, 207,5) pouvait être rendu radio-actif, s’il est placé en opposition à la cathode, dans le tube de Crookes.