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2° une solution autoritaire, qui a été adoptée en Allemagne et en Autriche et donne des résultats incontestables ; 3° et enfin, une solution socialiste, que ses promoteurs offrent aux masses avec les plus séduisantes promesses.

Préciser l’état de la question ; exposer les diverses propositions en les étudiant d’après les données scientifiques ; et montrer, à titre d’expérience, les résultats pratiques de la seule organisation qui fonctionne actuellement, l’assurance contre l’invalidité et la vieillesse en Allemagne, — tel est l’objet de ce travail[1].


I

La France peut s’enorgueillir d’avoir été la première à se préoccuper de cette question ; et ce serait à peine forcer les termes, de dire que Henri IV et Louis XIV ont été, en cette matière d’assurance sociale, de véritables précurseurs. La Caisse de Prévoyance des mineurs et la Caisse des Invalides de la Marine peuvent être considérées comme des types presque parfaits d’assurance corporative ; les étrangers s’en sont souvent inspirés ; et nous ne croyons pas qu’on ait trouvé mieux que la Caisse des Invalides. Saint Vincent de Paul, de son côté, avait cherché à organiser l’assurance paroissiale. Ces institutions étaient fondées sur les principes de la mutualité obligatoire, de l’association de l’épargne, et de la tontine.

Avec la Révolution, on vit apparaître une idée nouvelle ; les pensions, au lieu d’être le produit de l’épargne capitalisée, deviennent, par la loi de 1792, des récompenses nationales ; mauvais point de départ, qui conduit à des conséquences désastreuses pour les finances de l’Etat, et se prête à toutes les injustices et à tous les abus du favoritisme. Quand on organisa les premières caisses de retraites dans les administrations, on revint à l’idée de tontine, mais la loi de 1853 retomba dans la solution autoritaire, on pourrait dire socialiste. Ce défaut de suite dans la conception de l’assurance a beaucoup retardé en France la solution de la question.

  1. Pour nous guider, nous avons eu recours aux maîtres les plus autorisés en la matière, et nous nous sommes aidés des travaux de MM. Grüner, Cheysson, Jay, Bellom, et du livre du Dr Zacher. Nous devons en particulier un hommage reconnaissant à M. de Saint-Aubert, dont l’excellent ouvrage nous a permis de trouver réunis et mis au point tous les élémens de cette étude.