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nature. Il s’y rencontre, sans doute, des zones ou bandes de terrains médiocres, comme celle qui s’étend de l’extrémité du rectangle avancé de Zinder au Tchad ; là, sur une longueur de 120 kilomètres environ, l’on trouve un sol assez ingrat où les habitans vivent surtout de la production d’un sel de mauvaise qualité que le sous-sol fournit en quantités assez abondantes. Mais de beaucoup la majeure partie de la région offre tous les signes d’une grande richesse actuelle et d’une beaucoup plus grande richesse possible. Les villages, là où se sont arrêtés les ravages de Rabah, sont nombreux et florissans, les habitans affables ; ils ont des aptitudes industrielles, pour la poterie par exemple. Le gros bétail se rencontre partout et d’un très beau type : « leurs bœufs sont très beaux et pourvus de cornes énormes. » Effrayés par l’arrivée de la mission, les habitans de certains villages se sont enfuis, d’autres « se sont bornés à faire évacuer vers le nord de grands troupeaux de bœufs. Leurs bœufs, comme ceux d’Arégué, sont très beaux ; beaucoup d’entre eux, surtout ceux destinés au portage, sont castrés et la plupart en très bel état de graisse[1]… » Les moutons aussi abondent. La vie animale est, d’ailleurs, exubérante ; le gibier de toute nature pullule, et, par endroits, le pays est « une véritable volière[2]. »

La vie végétale ne le cède pas à la vie animale ; à chaque instant, le Journal de M. Foureau s’émerveille de la beauté des arbres. En voici un, aux abords d’un village détruit par Rabah : « Seul, archiséculaire, majestueux et énorme, un magnifique figuier sycomore étend sa ramure colossale à l’angle sud du village et offrirait sans exagération l’hospitalité de son ombre à un régiment tout entier[3]. » D’autres, aux termes du Journal de la mission, se contenteraient d’abriter chacun une centaine de cavaliers. Le figuier sycomore surtout paraît être gigantesque, M. Foureau lui applique cette épithète dans d’autres passages. Les cultures couvrent des surfaces considérables ; c’est le mil qui domine. « Le sentier ne quitte pas les cultures de mil… ; on chemine dans des cultures de mil à perte de vue, sillonnées de sentiers courant dans toutes les directions. Des troupeaux de bœufs et de moutons paissent de-ci de-là accompagnés

  1. Mission saharienne, p. 583, 594, 595, 630, 632, 644.
  2. Ibid., p. 633.
  3. Ibid., p. 640 ; voyez aussi p. 584, 590, 591, 592, 601, 604, 698, 612, 666.