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des êtres : l’unité morphologique forme le pendant de l’unité chimique.

C’est, en effet, un résultat infiniment digne d’attention dû aux études d’anatomie microscopique qui ont rempli une partie du XIXe siècle, d’avoir abouti à la doctrine cellulaire. Elles ont établi que les êtres vivans sont constitués par l’association des organites microscopiques que l’on appelle des cellules. L’édifice organique, quelles que soient ses proportions, immenses comme celles d’un chêne ou d’un éléphant, ou infimes comme celles des microzoaires qui échappent à la vue simple, ne met pas en œuvre une autre espèce de matériaux. Tout est cellule ; tout vient d’une cellule initiale (œuf) ; la cellule est une masse de protoplasme, de quelques millièmes de millimètre, en dimension linéaire.

Cette règle de la constitution des organismes aperçue dès 1838 par Schleiden et Schwann fut, de cette époque jusqu’en 1875, étendue à toutes les variétés de tissus, grâce aux travaux de Max Schultze, Ranvier et Kölliker.

Dans la période suivante Strassburger, Bütschli, Flemming, Kuppfer, Fromann, Heitzmann, Balbiani, Kunstler ont dévoilé l’extrême complexité de cet organite. Leurs recherches ont fait connaître la structure de ses deux parties, protoplasma cellulaire et noyau, et leur part respective dans la multiplication génétique. Elles ont montré que le protoplasme qui forme le corps de la cellule n’est pas homogène comme on l’avait cru ; qu’il a la structure d’une écume ou d’une mousse, ainsi que M. Kunstler l’a fort bien aperçu, dès 1880. Butschli a réalisé artificiellement des émulsions de ce genre ; il a vu que ces préparations reproduisaient tous les aspects du protoplasme cellulaire. Dans la cellule vivante le mélange de deux liquides non miscibles et de fluidité inégale donne lieu à la formation de logettes ; la substance la plus consistante forme la paroi (spongioplasme de Leydig), tandis que l’autre, plus fluide, en remplit l’intérieur (hyaloplasme).

Le spongioplasme pariétal se résout lui-même en rubans (mitomes) ou filamens dits chromatiques, parce qu’ils fixent fortement les couleurs d’aniline. Chacun de ces filamens est d’ailleurs formé de granulations en chapelet, les microsomes réunis les uns aux autres par une sorte de ciment, la linine, de l’ordre des nucléines, qui ne se colore pas[1].

  1. Ajoutons, pour compléter cette description sommaire de la constitution du protoplasme cellulaire, qu’il présente, au moins à un certain moment, un organe remarquable, le centrosome, qui a un rôle capital à jouer dans la division cellulaire ; sa préexistence n’est pas certaine, quelques auteurs le faisant sortir du noyau. Au moment de la division cellulaire il apparaît comme un amas pressé de granulations susceptibles de se colorer fortement : autour de lui se montre une zone claire, réfractaire à la coloration, c’est la sphère attractive ; au-delà, enfin, se dessine une couronne de stries qui divergent comme les rayons d’une gloire, c’est l’aster. — Enfin, il y a encore dans le corps cellulaire trois sortes de corps accidentels : les vacuoles, les leucites, les inclusions diverses. Les vacuoles sont des espèces de lacunes les unes inertes, les autres contractiles ; les leucites sont des organes préposés à la fabrication de substances particulières ; les inclusions sont des produits fabriqués ou des déchets.