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les accompagne ; elle veille autant que possible à la salubrité des logemens et, en général, à l’organisation d’un milieu plus hygiénique, tout cela autant, bien entendu, que le lui permettent ses ressources fournies par les versemens réguliers, les droits éventuels, le produit des fêtes et des ventes. Les collaborateurs, au nombre de mille environ, représentent la haute société et les professions libérales ; il y a aussi de riches marchands. Mme de Thal m’introduit dans le cabinet organisé pour les maladies des yeux et de la gorge, où l’on amène tous les jours tant de pauvres enfans ; à côté, le cabinet dentaire ; deux bonnes chambres pour recevoir les femmes opérées. « L’œuvre a commencé avec de très faibles ressources, » me dit la femme vraiment admirable qui a fait prospérer cette œuvre par son zèle au milieu des devoirs multiples de la famille et du monde. Artiste autant que philanthrope, elle prouve, en ne négligeant rien, la vérité de ce mot d’une doctoresse, écrivain et musicienne par surcroît, Mme Sachalsky : « On trouve toujours, si l’on veut, un moment pour tout dans cette petite vie qu’est une journée… Mais combien peu savent vouloir ! Ici, c’est l’application quotidienne à une pensée d’humanité qui entre peu à peu dans la vie mondaine et la transforme, en fait une vie religieuse, puisque l’amour du prochain déshérité y prend place.

Le même sentiment me paraît avoir inspiré la fondation d’une société féminine coopérative de bienfaisance dont le but est de procurer aux femmes pauvres des logemens peu coûteux, de l’ouvrage à domicile, des secours en cas de maladie et les moyens d’attendre une place. A la tête se trouve un Conseil de dix dames et d’une présidente chargées de juger des besoins de chacune des solliciteuses et de contrôler l’emploi des fonds. L’installation de ce cercle charitable m’a rappelé, dans des proportions modestes, les clubs d’Amérique. Il existe, d’ailleurs, deux clubs de femmes proprement dits à Saint-Pétersbourg, mais je ne les crois pas bien prospères, la division des sexes n’est pas plus en faveur dans la société russe que chez nous.

Je rencontre dans le salon de la princesse H…, à Saint-Pétersbourg, un charmant romancier qui est de ses amies, Mme Lydie Vesselitzky, celle qui signe Mikoulitch de fines études psychologiques, où l’on admire l’analyse pénétrante des caractères féminins et l’humour délicat du dialogue : Mimotchka, entre autres.