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la lente et méthodique préparation qu’il s’était donnée pour une exploration importante et décisive eussent été vaines, sans un incident de nature, en soi, secondaire. Il mourut, vers 1897, un homme méritant et modeste, ayant fait une très honorable carrière professionnelle, sans que les regards du grand public se soient jamais portés sur lui, M. Renoust des Orgeries, ancien inspecteur général des ponts et chaussées. Il faisait, depuis quelques années, partie du Comité de l’Afrique française, qui a pris une si grande part dans l’occupation d’un vaste morceau du continent africain par la France. On apprit à sa mort qu’il avait fait à la Société de géographie de Paris un legs de 250 000 francs pour « favoriser les missions qui, à l’intérieur de l’Afrique, peuvent contribuer à faire un tout homogène de nos possessions actuelles de l’Algérie, du Soudan et du Congo. »

On était, en 1897, revenu à une période de ferveur coloniale : la médiocre convention de 1890 entre la France et l’Angleterre, qui nous arrêtait quasi à la limite inférieure du Sahara ou, tout au plus, nous cédait une étroite lisière du Soudan central était proclamée insuffisante par l’opinion française. La région du lac Tchad était l’objet d’efforts méthodiques de nos explorateurs et de nos colonnes venant de l’est et du sud. L’idée vint d’y diriger aussi une troisième mission par la voie du nord et de faire effectuer entre elles sur les rives de ce lac, plus célèbre que connu alors, une jonction consacrant l’unité de nos possessions africaines, et soudant, par une démonstration matérielle éclatante, nos trois tronçons, le septentrional, à savoir l’Algérie-Tunisie, l’occidental, à savoir le Sénégal et nos provinces du Niger, le méridional enfin, c’est-à-dire notre Congo et les régions de l’Oubanghi et du Chari.

Le legs de M. Renoust des Orgeries tombait à point ; certes 250 000 francs ne devaient pas suffire à la tâche, et il est probable que l’on a dépensé une somme triple, sinon quadruple ; mais diverses sociétés, en particulier le Comité de l’Afrique française, des particuliers même, enfin une subvention du ministère de l’Instruction publique et l’entretien, naturellement, par le ministère de la Guerre de la petite troupe qu’il avait constituée en escorte à la mission s’ajoutèrent au legs de l’ancien inspecteur général des ponts et chaussées et couvrirent les frais de la traversée du Sahara central.

M. Foureau était tout indiqué pour être le chef de la