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rapide, ce qui donne à croire que, malgré son âge, qui d’ailleurs n’est pas encore avancé, sa constitution est restée vigoureuse et saine. Il y a aujourd’hui toute raison d’espérer que son règne aura une durée normale, et c’est ce que tout le monde désire en Angleterre et au dehors : on attribue, en effet, à Edouard VII des tendances conciliantes et sages qui, dans les limites de ses pouvoirs constitutionnels, peuvent s’exercer avec efficacité pour le bien de son pays et pour le repos du monde.

Quant au couronnement lui-même, il n’intéresse que les Anglais. La fête n’a pas eu tout l’éclat qui l’aurait entourée quelques semaines auparavant, si la maladie du roi n’était pas venue l’ajourner ; les missions étrangères n’y figuraient plus, et enfin il y a de certains frais qu’on ne peut pas renouveler deux fois ; mais la cérémonie, pour être plus intime, n’en a été que plus touchante. On a su gré au roi de l’effort de volonté qu’il avait fait pour que son couronnement eût lieu sans même attendre sa guérison complète. On a constaté avec joie qu’il avait repris les apparences de la santé. Le manifeste qu’il a adressé à son peuple a produit une émotion vive et profonde. Aussi les acclamations populaires ont-elles éclaté sur son passage avec un véritable enthousiasme. Sans doute, le couronnement d’Edouard VII ne change rien à rien ; mais les Anglais tiennent passionnément à toutes leurs vieilles traditions, et, après les inquiétudes pénibles qu’ils ont traversées, mêlées d’espoirs et de découragemens, ils regardent volontiers ce dénouement comme une sorte de succès. C’est une impression que le roi partage sans doute lui-même. En Europe, et notamment en France, l’opinion s’est associée en toute sincérité et cordialité à la satisfaction qu’éprouvait l’Angleterre. Les journaux ont rendu compte très longuement et très sympathiquement de tous les détails de la fête. On a senti que les deux peuples, lorsqu’une politique maladroite ne mettait pas leurs intérêts en conflit, n’avaient que de bons sentimens l’un pour l’autre et qu’ils étaient prêts à se réjouir mutuellement de ce qui leur arrivait d’heureux.


FRANCIS CHARMES.

Le Directeur-Gérant, F. BRUNETIERE.