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pour inquiéter aussi. Il fait envoyer à Londres, il fait insérer dans le Moniteur, le 13, le 14, le 17 mars, des notes destinées à remuer l’opinion en Angleterre : — Aucune puissance n’est disposée à soutenir les Anglais ; l’organisation de la République italienne est approuvée par le Pape, l’Autriche, la Russie, la Prusse ; Lucchesini a exprimé le plaisir qu’avait éprouvé son roi des opérations de la Consulte de Lyon ; Cobenzl déclare que son empereur approuve tout ce qui s’est fait en Cisalpine, en Helvétie, en Batavie ; les réponses de l’empereur de Russie sont « plus satisfaisantes encore, » et il s’y réunit des idées « de liaisons particulières. » « L’empereur Alexandre, écrit Bonaparte à Joseph, est plus disposé que jamais à marcher de concert avec la France pour toutes les grandes affaires de l’Europe. »

Rien de moins exact ; rien de moins conforme aux instructions données à Markof ; rien de positif non plus dans les correspondances de Cobenzl et de Lucchesini ; mais il n’existait pas alors de télégraphe électrique pour transmettre, le matin, des extraits de ces articles à Pétersbourg, Berlin, Vienne, et pour en rapporter à Paris, le soir, le démenti, par les feuilles officieuses de ces capitales. D’ailleurs, l’Autriche et la Prusse se trouvaient alors fort engagées dans l’affaire des indemnités d’Allemagne, et ce n’était point le cas, avant d’avoir touché leurs lots, de se brouiller avec le Consul.

Après quelques dernières escarmouches, sur les termes, à propos de Malte et de la Hollande, le traité fut signé, en minute, le 25, et en forme authentique, le 26 mars, tel, sauf de légères différences, que Joseph l’avait proposé le 6. Il se résume ainsi :


Il y a paix entre la République française, le roi d’Espagne, la République batave, d’une part, et, d’autre part, le roi de la Grande-Bretagne et d’Irlande. L’Angleterre garde Ceylan et la Trinité, restitue les autres colonies de la France et de ses alliés. L’intégrité de la Porte est garantie. Le prince d’Orange recevra une indemnité. Malte sera rendue à l’Ordre, neutre et indépendante, sous la garantie des grandes puissances, avec une garnison napolitaine pour un an ou plus, s’il est nécessaire. L’Angleterre évacuera l’île dans les trois mois qui suivront la ratification du traité. La France évacuera Tarente et les États romains. L’Angleterre évacuera tous les points qu’elle occupe sur l’Adriatique ; la Méditerranée, dans le mois qui suivra les ratifications ; les colonies, dans les six mois.