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Le dernier historien de la Bretagne

ARTHUR DE LA BORDERIE


I

La Bretagne du xixe siècle a eu tous les bonheurs et toutes les gloires. Après avoir donné naissance à des écrivains et à des poêles comme Chateaubriand, Lamennais, Brizeux, Renan et Jules Simon, à des romanciers comme Paul Féval et Émile Souvestre, à des folkloristes comme La Villemarqué et Luzel, à un musicien comme Victor Massé, à des artistes comme Jules Dupré, Elie Delaunay et Luminais, à un légiste comme Faustin Hélie, à un ingénieur comme Dupuy de Lôme, à des médecins et chirurgiens comme Broussais, Laënnec, Jobert de Lamballe et Alphonse Guérin, à des soldats comme Cambronne, Bedeau et Lamoricière, — je ne cite que les morts et parmi eux que les plus grands, — elle tira de son sein l’historien qui lui avait manqué jusque-là pour célébrer dignement les faits et gestes de ses premiers évêques, de ses rois, de ses ducs, de ses héros, de tous ceux qui lui ont fait à travers les siècles la figure originale qu’elle a dans le monde. Cet historien, plus grand que les Dom Lobineau et les Dom Morice, elle l’a perdu tout récemment[1] dans la personne de M. Arthur Le Moyne de la Borderie.

Certes, il n’en est pas un parmi les Bretons de marque que je viens de citer, dont la renommée, de son vivant n’ait surpassé la sienne, mais cela tient à ce fait que tous s’illustrèrent sur le

  1. Né à Vitré le 5 octobre 1827, M. de la Borderie y est mort le 17 février 1901.