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préférable que ces autorisations eussent été demandées. Pourquoi ne l’a-t-on pas fait ? M. Denys Cochin en a donné deux raisons à la Chambre. La première est qu’on n’aurait pas manqué plus tard, lorsqu’on fera un nouveau recensement de leurs biens, d’attribuer aux congrégations la propriété d’immeubles qui ne leur appartiennent pas, et où quelques-uns d’entre eux se contentent de professer. La seconde est qu’il ne faut jamais renoncer à l’exercice d’un droit, ou de ce qu’on croit en être un, avant d’y avoir été contraint par une décision régulière. Ces deux raisons ne nous ont pas convaincu. A chaque jour suffit sa peine : les statistiques de demain sont moins inquiétantes que la politique d’aujourd’hui, et c’est d’abord contre celle-ci qu’il fallait se mettre en garde. Quant au droit, il est contesté et contestable. Nous ne parlons, bien entendu, que du droit écrit, de celui qui résulte de la loi du 1er juillet 1901. L’article 13 de cette loi dispose qu’une congrégation ne peut fonder aucun nouvel établissement qu’en vertu d’un décret rendu en Conseil d’État. Mais qu’est-ce qu’un établissement nouveau ? Premier point à préciser. Et enfin un second point douteux est de savoir si la loi du 1er juillet 1901 sur les associations a porté atteinte à la loi de 1886 qui organise la liberté de l’enseignement secondaire.

La thèse soutenue par le gouvernement est qu’une maison, même fondée et dirigée par des laïques, est un établissement nouveau d’une congrégation, si un seul de ses membres y collabore à l’œuvre commune. Tout congréganiste emporte avec lui la congrégation à la semelle de ses souliers, comme on disait autrefois. Par conséquent, pour toutes les maisons où il y a un congréganiste employé, une autorisation du Conseil d’État est indispensable. Quant au second point, à savoir si la loi du 1er juillet 1901 a porté atteinte aux lois antérieures sur la liberté de l’enseignement, l’opinion du gouvernement ne s’est pas formée d’un seul coup ; elle a même été hésitante et variable ; mais enfin elle s’est enfin fixée dans le sens le plus restrictif. Des congréganistes qui veulent ouvrir une maison d’enseignement secondaire ne doivent pas se contenter de se soumettre aux lois scolaires ; il faut encore qu’ils remplissent toutes les obligations que leur impose la loi sur les associations. Nous avons raconté autrefois ce qui s’est passé à la Chambre, au cours de la discussion de cette loi. Interrogé sur sa portée, M. Waldeck-Rousseau a dit formellement, d’abord que la présence d’un ou de plusieurs congréganistes dans un établissement n’en faisait pas un établissement nouveau de la congrégation ; ensuite que la loi nouvelle laissait subsister toutes les