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de la profondeur de ses bassins, de ses chenaux et surtout de ses passes d’entrée. D’une manière générale, les chasses n’exercent une action bien sensible sur les fonds sablonneux qu’à une profondeur de 2 à 3 mètres au-dessous de la basse mer. Or, le commerce maritime demande aujourd’hui pour ses grands paquebots des profondeurs bien supérieures à celles dont on se contentait il y a une trentaine d’années à peine ; et, comme on ne peut songer à prolonger indéfiniment des jetées en mer pour atteindre cette profondeur, et que, sur une côte sablonneuse comme celle qui court de la pointe de Walde à Nieuport et qui tend toujours à s’engraisser un peu à cause de la protection même que lui procurent les bancs de Flandre, ces ouvrages avancés auraient pour conséquence de provoquer l’allongement de la plage, il faut nécessairement draguer au large en pleine rade, à une distance de près d’un kilomètre de l’extrémité des musoirs.

Le problème est heureusement résolu aujourd’hui d’une manière très satisfaisante. On sait les magnifiques résultats obtenus par les nouveaux appareils dragueurs. Jusqu’à ces dernières années, ces appareils consistaient principalement en de grands chapelets de godets qui s’enroulaient sur une roue ou en énormes cuillers actionnées par la vapeur. Les déblais extraits du fond de l’eau par les godets ou les cuillers étaient versés dans des chalands qui allaient ensuite les décharger à une certaine distance.

Tous les ingénieurs ont vu ou entendu parler des dragues puissantes de la Tyne et de la Clyde, qui élèvent dans une année plus d’un million de tonnes de sable et de vase, ce qui représente plus de 3 000 mètres cubes par jour ; et, tout récemment, dans les bras maritimes du Mississipi, on a installé des dragues qui ont extrait 750 mètres cubes à l’heure, ce qui donne un rendement annuel de plus de 2 millions de mètres cubes[1]. Ces magnifiques outils fonctionnent à la vérité dans des eaux relativement calmes et ne pourraient travailler en mer avec de petites vagues de houle de 40 à 50 centimètres seulement. Ce grave inconvément n’existe plus pour les nouvelles dragues presque exclusivement adoptées aujourd’hui, à la fois hydrauliques et aspiratrices, et dont l’organe essentiel est une énergique pompe centrifuge. Par l’intermédiaire d’un tuyau élastique dont l’extrémité

  1. Les dragues du Mississipi, Annales des Travaux publics de Belgique, juin 1891.