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en entier. Le chenal envasé fut recreusé, le bassin du Petit-Paradis réparé. L’avant-port d’échouage aménagé devint un second bassin qu’on appela le Grand-Paradis, et on entoura la ville d’une nouvelle enceinte de remparts. On construisit ensuite tout autour un système assez compliqué de digues allant du fort Nieulay à Sangatte, de manière à bien circonscrire la crique naturelle où les eaux se répandaient autrefois dans une sorte d’étang assez mal défini ; et le tout fut protégé et défendu par la tour du Risban qui commandait l’entrée du port.

Calais fut alors choisi comme principal entrepôt pour le transit des laines entre l’Angleterre et la Flandre, et on l’appela « l’étape des laines. » Ce fut bientôt une place de commerce très fréquentée, et le mouvement du port y prit rapidement une très sérieuse importance. Mais, en l’année 1558, un coup de main hardi du duc de Guise porta heureusement un terme à cette odieuse mainmise sur le territoire de la France ; et, sauf une courte occupation des Espagnols qui prit fin à la paix de Vervins, le Cambrésis, qu’on aimait à appeler « le Pays reconquis, » nous demeura pour toujours assuré[1].

Le port, cependant, était loin de satisfaire aux exigences du commerce ; les bassins étaient insuffisans, les conditions de l’entrée assez médiocres, le chenal souvent ensablé. Les premiers projets sérieux d’amélioration furent l’œuvre de Vauban, qui reconnut tout de suite que l’avenir du port était intimement lié à la régularité et à la puissance des chasses. C’était, en effet, le seul artifice que l’on connût à cette époque pour dégager un chenal et des bassins à chaque instant atterris. Toute la plaine triangulaire qui s’étend au Sud-Ouest, et dont Watten, Gravelines et Calais sont les trois extrémités, présente une pente très faible, mais uniforme, vers cette dernière ville, qui en est en quelque sorte l’exutoire naturel. Les travaux de tous les ingénieurs modernes, — écluses, bassins de retenue, prolongement des jetées, — ont été jusqu’à ces derniers temps conçus et exécutés en vue d’évacuer par là les eaux de toute la région wateringuée et d’utiliser leur force de propulsion pour soutenir et continuer autant que possible l’action des chasses jusqu’à la laisse des basses mers.

Sans compter les puissans appareils de dragage, à peu près

  1. Bernard, Annales de la ville de Calais et du pays reconquis, 1715.