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à Abydos, de la Victoire de Samothrace, de l’Amour et Psyché, du Gladiateur mourant du musée du Capitole à Rome, on trouvera des œuvres des peintres de toutes les grandes écoles, qu’on ne se lassera pas de contempler dans ces superbes reproductions que commente, avec l’accent de la sincérité, le lyrisme de la poésie, un admirateur enthousiaste.

Les amateurs d’art auront encore de quoi se satisfaire dans la monographie de Venise[1], écrite par M. Pierre Gusman, qui s’est surtout préoccupé de mettre en valeur le côté philosophique de cet art vénitien, tour à tour élégant, plein de grâce et pompeux, qui illustra les fastes de la Ville des Doges et qui fut l’interprète fidèle et hardi des mœurs de la puissante République.

Si notre siècle n’a pas beaucoup agrandi le domaine de la beauté, il en a du moins le respect comme il a celui de l’enfance. À cette même pensée de glorifier la beauté répond le livre unique en son genre : Les Portraits de l’Enfant[2], où M. Ch. Moreau-Vauthier a rassemblé des portraits d’enfans de tous les temps, aussi variés dans leur diversité que le furent leurs destinées mêmes, mais qui tous se distinguent, à des titres divers, par le coloris, la grâce, la fraîcheur, et sont précieux pour marquer l’évolution d’un genre relativement moderne, puisque l’art antique ne se préoccupa guère de reproduire la gracieuse image de la première enfance, si ce n’est dans les représentations des héros et des dieux de l’Olympe et les figurines des temples et de la maison. Les œuvres des artistes les plus célèbres y sont réunies dans la confraternité du génie, et le vœu naguère exprimé ici même, après l’Exposition de l’enfance au Petit Palais, que le souvenir de cette collection d’admirables portraits, où s’est reflétée l’enfance avec toutes ses caractéristiques, soit à jamais fixé, se trouve ainsi réalisé. La vision enchanteresse ne disparaîtra plus. Les premières pages de ce livre consacrées à l’antiquité et au moyen âge montrent quels furent, dans la légende et l’histoire, les débuts des artistes. L’art égyptien donne déjà ces délicieuses statuettes conservées aux musées de Turin et du Louvre : les peintures de Tell et Amarna représentant les filles du pharaon Khouniatonou, le bas-relief figurant Ramsès II, dit Sésostris. L’imagination de la Grèce la portait à tout diviniser, et l’enfant devint pour elle le petit génie, — Harpocrate, le petit dieu du silence, — le petit Amour. Le moyen âge, accablé par les famines, les guerres, les épidémies, et

  1. Venise, par M. Pierre Gusman, 1 vol. in-8o illustré ; H. Laurens.
  2. Les Portraits de l’Enfant, par M. Moreau-Vauthier, 1 vol. gr. in-8o, illustré de 20 héliogravures et de 284 gravures ; Hachette.