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MADAME DE MAINTENON
D’APRÈS LES
SOUVENIRS INÉDITS D’UNE DE SES SECRÉTAIRES

Dans l’orbite des grands de ce monde (j’entends de ceux qui ont fait grande figure dans l’histoire ou les lettres), on voit souvent graviter des satellites de second ou de troisième ordre, qui tournent avec fidélité autour de l’astre dont un rayon les éclaire à peine. La foule ignore leurs noms, les érudits ou les lettrés connaissent seuls leur existence. Ainsi, sans remonter plus haut, La Boétie autour de Montaigne, le Père Joseph autour de Richelieu, Boswell autour de Johnson, Eckerman autour de Gœthe, Ballanche autour de Chateaubriand. A pénétrer dans le détail de leurs vies modestes, on peut trouver cependant intérêt et profit. Parfois ces figures qui sont demeurées dans l’ombre, obscurcies par l’éclat de l’astre principal, ont elles-mêmes leur charme de couleur ; parfois aussi on y peut surprendre quelques reflets de la lumière au sein de laquelle elles ont vécu.

C’est ainsi que je voudrais consacrer quelques pages au souvenir d’une femme dont toute la jeunesse s’est passée dans l’étroite intimité de Mme de Maintenon, depuis 1705 jusqu’à 1719, c’est-à-dire jusqu’à l’année où la mort vint enfin atteindre, dans sa retraite de Saint-Cyr, la veuve de Scarron et de Louis XIV. Le nom de Mme d’Aumale, dont Saint-Simon n’a jamais parlé et que Dangeau ne mentionne, en passant, que trois fois, est cependant bien connu de tous ceux qui se sont occupés de Mme de Maintenon, à cause des Souvenirs, encore inédits, qu’elle a laissés. De ces Souvenirs, le duc de Noailles et M, Lavallée, dans leurs