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a une autre portée. En faisant leur histoire, on se trouve avoir fait celle des radiations de la même famille, des rayons Röntgen qui sont, eux, fertiles en applications, et des rayons de Becquerel qui ne sont qu’un mélange des deux autres espèces.

En second lieu, les rayons cathodiques sont les ascendans et les générateurs obligés des autres. Leur mécanisme et leur véritable nature sont mieux connus.

De plus, les rayons cathodiques (et les rayons de Röntgen et de Becquerel qui les accompagnent ou qui en émanent) ne sont pas le simple résultat d’un artifice de la part des physiciens. Ils constituent un phénomène naturel qu’il est impossible de négliger. Loin d’être rare, leur production est incessante. Il ne tombe pas un rayon de soleil sur une surface métallique, il ne s’allume pas une flamme, il n’éclate pas une étincelle électrique, il ne se produit pas une décharge, pas un corps ne devient incandescent sans qu’apparaisse le rayon cathodique pur ou transformé. C’est à G. Le Bon que revient le mérite d’avoir aperçu, dès l’abord » la grande généralité de cet ordre de phénomènes. Encore bien qu’il se soit servi du terme impropre de lumière noire — il n’en a pas moins saisi l’universalité et les principaux caractères de cette production. Il a, surtout, remis le phénomène à sa vraie place en le transportant du cabinet du physicien dans le grand laboratoire de la nature. P. de Heen, le professeur bien connu de l’université de Liège, a adopté une conception analogue. Il considère que presque tous les foyers d’ébranlement de l’éther engendrent une émanation comparable à celle du tube de Crookes. Nous aurons l’occasion d’y revenir à propos de la radio-activité de la matière.


IV

On se souvient de l’étonnement et de l’admiration qui accueillirent, vers la fin de l’année 1895, la découverte de M. Röntgen. Le savant physicien de Wurzbourg montrait des silhouettes photographiques obtenues à travers des corps opaques, des lames de carton, des feuilles de papier, des livres épais, des dictionnaires, des plaques de bois de plusieurs pouces. Il donnait le moyen de recueillir sur un écran l’ombre fluorescente des corps cachés par des paravens, ou enfermés dans des boîtes, c’est-à-dire, en quelque sorte, de voir indirectement à travers ces obstacles.