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on ne voit pas que cet intérêt puisse être compromis, par un rapprochement hispano-américain. Pour ce qui est de la France, la question est plus complexe, car notre pays a des rapports commerciaux importans avec l’Amérique latine, et, d’autre part, il y exerce une influence morale et intellectuelle très sensible. Mais notre situation y est assez solidement assise pour que nous puissions ne pas craindre de la voir péricliter, d’autant plus que notre pays représente, dans l’ordre commercial et économique, un facteur singulièrement plus puissant que l’Espagne. Cela ne veut pas dire, cependant, que notre commerce doive se désintéresser complètement de la question ; il doit la suivre, au contraire, et agir selon les circonstances. Quant à notre influence intellectuelle et morale, elle est trop prépondérante dans tous les pays latins pour être menacée par un rapprochement, même étroit, entre l’Espagne et l’Amérique latine. Il semble plutôt, puisqu’elle est encore plus accentuée en Espagne qu’en Amérique, que nous pourrions user de ce rapprochement comme d’un moyen pour faire tomber dans notre sphère d’attraction intellectuelle les Républiques hispano-américaines. Nous estimons donc, pour toutes ces raisons, que le rapprochement hispano-américain, bien loin de nuire à une partie quelconque du monde latin, ne pourrait que servir les intérêts généraux de la latinité.


ALCIDE EBRAY.