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au lendemain des invasions doriennes, une de celles qui lancèrent leurs hardis marins à la conquête du littoral méditerranéen. Déjà, en 1765, deux voyageurs anglais, Chandler et Revett, envoyés par la société anglaise des Dilettanti, avaient reconnu les ruines du principal sanctuaire de Priène, le temple d’Athéna Polias, une des merveilles de l’architecture ionienne du IVe siècle, qui fit la gloire de l’architecte Pythios. En 1868, nouvelle exploration, due encore à l’initiative des Dilettanti, et dirigée par M. Pullan[1]. En 1873, deux savans français, O. Rayet et Albert Thomas, firent du temple une étude minutieuse d’où est sortie la belle restauration publiée dans un ouvrage que la mort d’un des auteurs devait laisser inachevé[2]. Pourtant la ville grecque restait ignorée. Elle n’a été dégagée que dans ces dernières années, grâce aux fouilles poursuivies depuis 1895, sous les auspices des musées royaux de Berlin, par les soins de MM. Wiegand, Heyne et Schrader. Le succès a été complet. La découverte d’une grande ville ionienne, entièrement reconstruite sur un plan d’ensemble vers le temps d’Alexandre ; la résurrection d’une sorte de Pompéi hellénistique, avec ses rues, ses places, ses maisons, ses édifices publics, tel est le bilan des fouilles de Priène. Ces résultats ne sont encore connus que par des rapports sommaires[3] ; ils attendent une publication définitive. Je me propose seulement de résumer ici les impressions que m’a laissées une excursion à Priène, faite au mois d’avril 1898. Cette visite m’a été facilitée par la parfaite courtoisie de M. Wiegand, et, sur le champ de fouilles, j’ai trouvé dans la personne de M. Schrader le guide le plus obligeant.


I

Le trajet de Smyrne à Priène se fait en partie par la ligne du chemin de fer d’Aïdin. A la station de Baladjik, près de l’ancienne Magnésie du Méandre, un embranchement se détache

  1. Les résultats des recherches de M. Pullan sont exposés dans le tome IV des Antiquities of lonia, 1881.
  2. Milet et le golfe Latmique, Paris, 1877.
  3. Gonze, Jahrbuch des arch. Instituts, 1898, Anzeiger, p. 68 et suivantes. Schrader, Wochenschrift für klassische Philologie, 1898, et Jahrbuch, 1898, p. 178 et suivantes. Le travail de M. Schrader est jusqu’ici le résumé d’ensemble le plus complet qui ait été publié sur les fouilles de Priène. J’ai eu souvent l’occasion d’y secourir pour contrôler et préciser mes notes de voyage.