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sorte de monnaie destinée à récompenser certains services rendus, et il faisait en même temps ressortir le discrédit que les concessionnaires jetaient sur la colonie. À son tour, le 12 février 1884 le Conseil supérieur de gouvernement de l’Algérie se prononçait pour la vente aux enchères des terres publiques. Trois ans après, le gouvernement général affirmait que « la concession gratuite, au moins comme système général, était condamnée, et faisait un grand éloge de la vente des terres. » Malheureusement ni M. Tirman, ni le Conseil supérieur de gouvernement, ne purent aller jusqu’au bout et abolir complètement le régime de la concession gratuite. Trop d’intéressés vivent de ce régime, qui permet de payer les services électoraux. Mais, et dès cette époque, l’administration, se conformant aux vues du gouvernement général, est entrée de la façon la plus heureuse dans la voie de l’adjudication des terres du domaine public. En 1885, 7 300 hectares étaient mis en adjudication, les indigènes et les étrangers étant exclus, et cette opération réussissait à merveille. Presque tous les lots trouvèrent preneur sur la première mise à prix, qui fut de beaucoup dépassée, parfois plus que doublée. De 1884 à 1893, 81 995 hectares ont été ainsi aliénés pour une somme totale de 18 017 788 francs, soit par vente de gré à gré, soit par adjudication, et cette opération a continué sans interruption jusqu’à nos jours. C’est ainsi que, chaque année, le Domaine aliène en lots de vente pour terrain de colonisation ou autres plusieurs milliers d’hectares, 7 000 en moyenne, qui produisent bon an mal an de 5 à 600 000 francs. Il est vrai que les Français de la métropole ont montré jusqu’ici peu d’empressement à se présenter aux enchères et que ce sont plutôt les Algériens qui se portent en plus grand nombre acquéreurs ; mais nous pensons avec beaucoup que c’est un mal auquel on peut remédier. Il suffit que l’Etat veuille ne pas se montrer étranger aux conditions élémentaires d’un commerce sérieux et actif. La première de ces conditions, c’est la publicité. Or, on n’en fait aucune. De temps en temps, il est vrai, le gouvernement général, par les organes officiels, annonce des adjudications de terres ; après quoi, l’on s’étonne que les métropolitains ne prennent pas le train et le bateau pour venir miser aux enchères. Mais ce n’est pas seulement dans quelques organes officiels que ces adjudications devraient être insérées ; des affiches devraient les faire connaître dans tous les petits journaux du Midi et du Centre, dans les mairies et les