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peut produire l’obscurité. Un écran éclairé par deux sources lumineuses capables, l’une et l’autre, de l’illuminer si elles agissent séparément, peut être plongé partiellement dans l’obscurité si on les fait opérer simultanément : il présentera une alternative de plages sombres et de plages brillantes, c’est-à-dire les franges de Fresnel.

L’observation commune paraît nettement contraire à un tel résultat. Nous ne voyons pas qu’en allumant deux bougies nous soyons moins éclairés qu’avec une seule et que des franges alternativement claires et obscures viennent barioler le champ d’illumination. Cela tient à ce que les conditions du phénomène sont si particulières qu’il faut l’habileté artificieuse du physicien pour les réaliser. La vibration lumineuse, avec ses deux phases périodiquement opposées, permet d’en entrevoir la possibilité.

On conçoit que, si deux ondes identiques, mais en retard l’une sur l’autre d’une demi-longueur d’onde, viennent aboutir sur une particule d’éther et la solliciter simultanément, elles pourront s’annihiler réciproquement ; alors le point restera inéclairé. Si, au contraire, la différence des distances aux deux sources identiques, — la différence de marche, ainsi qu’on l’appelle, — est d’une longueur d’onde, ou d’un nombre entier de longueurs d’onde, les deux sollicitations étant de même sens, les effets s’ajouteront et l’illumination sera doublée. Young et Fresnel ont combiné le dispositif convenable pour que les effets lumineux se contrarient ainsi ou s’ajoutent d’une manière permanente, dans les mêmes parties du champ. Mais, on comprend bien aussi que, si ces conditions très particulières ne sont pas réunies, il se produira en chaque point du champ une sorte d’état moyen et confus d’illumination : et c’est précisément ce qui se produit dans les cas ordinaires.

L’interférence de deux lumières produisant l’obscurité établit nettement que l’agent lumineux ne peut être une grandeur absolue : il ne saurait être un fluide matériel, agissant par sa quantité, puisque en additionnant des quantités de matière on aurait toujours un total supérieur à chacune d’elles. Il faut que la lumière soit une grandeur qui comporte des oppositions de signe, en un mot une grandeur vectorielle, afin que le résultat de l’addition algébrique de deux d’entre elles puisse être moindre que chacune, ou même nul. C’est là la conséquence obligatoire de l’interférence. La vibration lumineuse, telle que nous avons