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nous parlons serait affreusement discordant pour l’oreille. On pourrait comparer plus exactement à la gamme harmonique le spectre d’un gaz incandescent, qui lui aussi est discontinu, et qui présente seulement une série de raies brillantes éclatant sur un fond sombre, comme les notes isolées d’un accord. En analyse spectrale, cette sorte d’accord lumineux caractérise chaque substance, à la façon de ces héros du drame musical, qui ont chacun leur leitmotiv particulier pour révéler leur présence ou annoncer leur entrée.

La connaissance de l’éther lumineux vient de faire un nouveau pas, grâce à la notion de la diversité des vibrations dont il est susceptible, vibrations dont le nombre est compris entre 400 et 800 trillions par seconde. Elle est l’octave des couleurs, et le nom est mérité, cette fois, puisqu’il s’agit de vibrations dont le nombre varie du simple au double, comme pour les notes extrêmes de la gamme ordinaire. Toutes les autres couleurs sont composées ; ce sont des combinaisons de celles-là. Mais, l’inventaire des vibrations lumineuses n’est pas encore complet. On connaît des vibrations plus rapides que celles qui donnent la sensation du violet ; on en connaît de plus lentes que celles qui donnent la sensation du rouge. Et comment les connaît-on ? Par le spectre lui-même qui les montre isolées, séparées, analysées, en deçà du rouge, dans ce que l’on appelle la région infra-rouge, ou, au-delà du violet, dans la région ultraviolette. Leur présence là montre bien que rien de plus ne distingue ces rayons que ce qui distingue les autres, c’est-à-dire les longueurs d’onde, ou les nombres de vibrations auxquelles ils correspondent, émanés du soleil avec les autres, confondus avec ceux-ci. Jusqu’à la rencontre du prisme, ils ont subi les mêmes réfractions. Seulement, ils n’exercent pas sur la rétine d’action qui provoque la sensation de lumière. On les manifeste dans l’infra-rouge au moyen du thermomètre, de la pile thermo-électrique ou du bolomètre : ce sont des radiations calorifiques. Elles forment deux octaves environ au-dessous de la partie lumineuse du spectre, depuis le chiffre de 30 trillions à 200, et de 200 à 400, où ce spectre calorifique rejoint le spectre lumineux. Les radiations ultra-violettes sont signalées par leur action sur la plaque photographique, par les phénomènes de fluorescence ; et, en général, par les effets chimiques. Elles sont dites actiniques. Elles embrassent l’étendue d’une octave environ ; de