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— toujours verte. Cependant, les deux candidats en théologie se sont trouvés en compétition pour une paroisse de Thuringe. La nomination dépend du seigneur du village, lequel impose une certaine condition, que le vieux fiancé, Linsenbart, n’a pas cru pouvoir accepter, mais dont le jeune, Hofmann, s’est accommodé. Tante Dorette avait eu des espérances, dont la réalisation se trouve une fois de plus remise aux calendes grecques. Elle ferait mieux de laisser sécher sa verdure et d’accepter le doigt de cour de M. Kleinschüttel, fonctionnaire aux douanes de Berlin. M. Kleinschüttel est ambitieux, résolu à faire son chemin par tous les moyens possibles ; et le voici justement qui vient rater chezcon Rose un coup de maître qui ne manquera pas de lui valoir de l’avancement. Un pauvre diable, qui venait de la Thuringe, avait un sac sempli de monnaies de Nuremberg — pour quatre cents thalers. Or, la monnaie de Nuremberg étant interdite en Prusse, M. Kleinscüttel lui a saisi son pécule, sans tenir compte de l’évidente bonne foi avec laquelle le malheureux affirmait son ignorance de la loi qu’il violait sans s’en douter. Non content de cet excès de zèle, il a persuadé au voyageur de se rendre auprès du roi, et de l’implorer en lui contant son affaire : car le roi, calcule-t-il, enverra le contrebandier en prison, et donnera de l’avancement au matin fonctionnaire qui détrousse ainsi les voyageurs, selon les formes de la loi. Il est superflu de dire que le malheureux voyageur n’est autre que Linsenbart. Mais le roi de Prusse surveille d’un œil attentif les jeux du fisc et du hasard. Il devine les machinations diaboliques de Kleinschüttel, le fait conduire lui-même en prison, ordonne que Linsenbart reçoive quatre cents thalers de bon argent prussien en échange de son mauvais argent de Nuremberg, et le nomme professeur dans un gymnase, avec des appointemens qui lui permettent d’épouser Dorette. En même temps, — dans les pièces de M. de Wildenbruch, il y a souvent des simultanéités merveilleuses, — une lettre du fiancé de Florette annonce qu’il reprend sa parole ; et l’on apprend à point nommé ce qu’était la fameuse condition imposée par le seigneur du village : le pasteur devait s’engager à épouser la femme de chambre de la comtesse !… Un chapeau en plumes de marabout consolera Florette, et tout le monde sera content.

C’est ainsi que, de pièce en pièce, la conscience du devoir