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— Comment s’appelait son mari ?

— Ludolf, Majesté.

— A partir d’aujourd’hui, elle est madame Ludolf, et touchera sa pension comme veuve d’un maréchal des logis.


La loi n’admet, je crois, que le mariage in extremis. Le roi institue ici le mariage posthume. Suprema lex regis voluntas. Qui songerait à le blâmer ? La vraie justice, qu’il représente, importe plus que les règles de l’État civil. Aussi le peuple l’acclame et l’adore. et Auguste résume l’impression de tous en s’écriant :


— Majesté, vous êtes un roi, vous comprenez le cœur de votre peuple !


Guillaume II revient souvent sur cette idée, qu’il exprime parfois avec plus d’ampleur, plus d’autorité, et même plus de poésie que M. de Wildenbruch :

« En demandant à Dieu la force de remplir les devoirs royaux que sa volonté m’a imposés, je suis soutenu par une confiance dans le peuple prussien dont témoigne toute notre histoire[1]… » « Un margrave de Brandebourg ne peut travailler pour son pays avec des perspectives de succès, que s’il se sait sûr de la confiance de son peuple[2]… »


Jungfer Immergrün est une autre historiette, encore un peu plus invraisemblable que der Junge von Hennersdorf, et plus compliquée dans sa brièveté, où le même Frédéric II reparait comme deus ex machina.

Le pharmacien Rose, à Berlin, a une sœur, nommée Dorette, et deux filles, Julie et Florette. Florette, sa préférée, est gaie, malicieuse, légère et railleuse, et fiancée à un candidat en théologie, jeune et brillant ; Julie est bonne et douce ; Dorette est un peu ridicule : depuis beaucoup d’années, elle est fiancée, elle aussi, à un candidat en théologie, mais qui, n’ayant jamais trouvé de place, n’a jamais pu l’épouser. Elle ne lui en est pas moins restée fidèle : il ne revient pas, mais elle l’attend, en récitant à son portrait les vers de Klopstock qu’il lui a jadis murmurés dans le clair de lune ; et ce portrait est toujours entouré de verdure fraîche, — ce qui vaut à Dorette le surnom de Immergrün,

  1. An mein Volk, 18 juin 1887, ouvrage cité. p. 10.
  2. Festmahl des Brandenb. Provinziallandtages, 26 fév. 1894, ouvrage cité. p. 265.