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Schwarzenberg, qu’appuient les colonels ; et pour agir, il n’a d’autre force que celle de son autorité ! Ayant une Ame de souverain, il en devine le mystérieux pouvoir, et la révèle aussitôt à ceux qui le tenaient pour un jeune homme sans conséquence, et qui se mettent à trembler devant lui. (C’est à peu près le revirement qui termine l’Edouard II, de Marlowe). A sa voix, le vieux Schwarzenberg comprend l’erreur de sa longue carrière, et salue en lui le prince providentiel, le pilote ; dont l’œil distinguera la bonne voie même à travers les ténèbres ambiantes. Mais les colonels sont plus endurcis, comme on le voit dans, la forte scène où Rochow, leur chef, parle à peu près comme autrefois Dietrich Quitzow :


ROCHOW.
Vous étiez pour moi le premier de notre État,
Le généralissime de notre année…
FRÉDÉRIC-GUILLAUME.
Mais je suis le prince de ton pays,
Maurice-Auguste, n’est-ce pas davantage ?
ROCHOW.
Que l’homme d’État vous admire,
Cela m’est égal !
Le soldat et le général,
Voilà ce que je voyais en vous,
Et il n’y est plus !…
FREDERIC-GUILLAUME.
Il y est !
Mais tu ne peux pas le comprendre,
Car toi-même n’es pas un soldat.
ROCHOW, le regarde avec stupéfaction, puis éclate de rire.
Je ne suis pas un soldat ?…
Pardonnez-moi, cela ne convient pas,
Mais à celui qui me dit cela,
Je ris au visage !
Car que serais-je donc ?
FREDERIC-GUILLAUME.
Un lansquenet, Rochow !