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l’impulsion morale, la seule qui à ce moment détermine le mouvement. Elles ne poussent pas les troupes arrêtées, elles les entraînent.

Ainsi se trouve-t-on ramené à voir la principale puissance des attaques résider dans l’impulsion morale.


Depuis 1870, les Allemands ont plusieurs fois modifié leurs règlemens. Pendant de longues années, l’Empire n’étant pas encore soudé, il fut jugé nécessaire de couler dans le moule prussien les soldats des différens Etats. La discipline frédéricienne était un instrument permettant d’atteindre rapidement ce but. Elle fut énergiquement employée, et, comme conséquence, les formations rigides, les attaques compactes continuèrent à faire partie des procédés de combat. Mais, à mesure que l’unité allemande se développait, que le maître d’école, ainsi que les sociétés de vétérans, faisaient pénétrer dans la masse l’idée de la patrie allemande dominatrice, la discipline revêtait des formes moins rudes. Les chefs se sont adressés davantage aux sentimens du soldat, en même temps que dans les règlemens apparaissaient des dispositions moins formalistes.

La comparaison des grandes manœuvres impériales en 1898, 1899 et 1900, fait saisir la pensée directrice de l’évolution.

Pendant les manœuvres de 1898, il est impossible de constater une différence entre les procédés tactiques employés et ceux des années précédentes. Toutefois, on perçoit un courant d’idées qui peut se résumer ainsi :

Les dernières guerres ont montré que les batailles modernes procédaient par des successions d’actions violentes, suivies d’accalmies. Ces actions violentes, sortes de crises, durent peu, lorsque toutes les troupes sont énergiques. Au contraire, les accalmies sont d’autant plus longues que la crise a été plus violente et que les troupes qui sont alors amenées pour la reprise du combat ont été tenues plus éloignées.

A mesure que les armes se perfectionnent, les crises deviennent plus courtes, tandis que les accalmies se prolongent. Les Allemands estiment que la puissance des armes nouvelles rendra la décision plus prompte que par le passé. Dès lors, quand l’action est résolue, il y a tout intérêt à la mener très vite, avec la plus grande vigueur.

De ces considérations se dégage ce principe que, dans