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y sont expliqués en détail ; les mots sont parfois (comme déjà dans Richelet) accompagnés de leur étymologie présumée. Aucune pensée de purisme n’en a d’ailleurs dirigé le choix : le désir de l’auteur a été d’être aussi complet que possible. On sait que son livre, toujours accru dans le sens encyclopédique qu’il avait dès l’origine, est devenu, après avoir passé par les mains du réfugié Basnage, le célèbre Dictionnaire de Trévoux, publié par les jésuites établis dans cette ville, ouvrage qui eut plusieurs éditions au XVIIe siècle, fut, comme on l’a justement remarqué[1], « pour un autre camp une sorte d’Encyclopédie, » et fournit aujourd’hui une mine abondante de l’enseignemens à ceux qui veulent connaître la France de l’ancien régime dans sa vie publique et privée.


II

Le but que s’était proposé l’Académie, en composant son Dictionnaire, avait été de recueillir tous les mots de la langue d’un usage vivant et approuvé, en tant qu’ils pouvaient entrer dans des compositions littéraires ; de les définir exactement, sous la même réserve, dans tous leurs sens ; de donner, sans établir de règles positives de syntaxe, des exemples bien choisis qui feraient voir la manière de les employer avec propriété et correction ; de relever les locutions toutes faites, et notamment les locutions proverbiales, où ils figuraient. Le Dictionnaire devait donc faire connaître à la fois le sens exact et le bon usage des mots et des expressions. Ce bon usage, il ne devait pas le créer : il prétendait seulement le constater ; mais on pensait que ce que l’Académie aurait consacré serait généralement reconnu et que ce qu’elle aurait condamné, — presque toujours par simple prétention, — serait rejeté.

Comment s’y prit la compagnie pour remplir ce programme, qui répondait parfaitement aux idées de son fondateur ? Aujourd’hui le travail auquel elle se livre est très simplifié. Quand elle prépare une nouvelle édition, elle prend, naturellement, l’édition précédente pour base ; elle ajoute des mots nouveaux, qui lui sont indiqués par les autres dictionnaires ou qui lui sont suggérés par quelqu’un de ses membres ; elle retranche ceux qui, au

  1. F. Brunot, dans l’Histoire de la littérature et de la langue françaises, publiée sous la direction de Petit de Julleville, t. V, p. 762.