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Au 2e régiment de la garde, des faits analogues se produisent. Dès qu’il débouche en masse profonde, ses pertes sont « gigantesques, » dit l’état-major allemand. Les bataillons ont essayé de prendre leur formation normale de combat, sans y réussir. Les compagnies se mêlent. Le bataillon de tête, qui attaque avec 900 hommes, a 503 morts ou blessés et, de ses 17 officiers, un seul est debout. Le 2e bataillon, qui n’a pas tiré un coup de fusil, est déjà désorganisé. De sa formation initiale, il ne reste qu’un essaim épais de tirailleurs. Ses 8 officiers sont hors de combat avec 61 pour 100 de ses hommes de troupe.

Le major Kuntz, dans son étude sur l’attaque de Saint-Privat, estime qu’à 6 heures et demie, sur 11 660 hommes engagés, il restait à peine 4 600 hommes en état de combattre. Le soir, sur 21 200 hommes comptant à l’effectif, la garde avait perdu 217 officiers et 6 173 hommes.

De telles erreurs étaient-elles imputables aux règlemens de manœuvres en usage chez les Prussiens et à leurs procédés tactiques ? C’est possible. Mais on peut aussi admettre l’influence de la tradition, comme semblent l’indiquer les événemens qui se développèrent le même jour à l’Est de Gravelotte.

Sur ce point, vers 4 heures, les Allemands avaient l’intention de percer le centre français à la ferme de Moscou. Là devait avoir lieu l’attaque décisive.

Le roi de Prusse, le maréchal de Moltke, le général Steinmetz, tout le grand état-major, sont réunis à la sortie Nord-Est de Gravelotte, sur la route de la forme Saint-Hubert et de Moscou.

Devant eux, au son des tambours et des fanfares, défilent les troupes lancées à l’attaque.

Cette attaque avait été préparée par l’action du 7e corps tout entier et d’une division (la 5e) du 8e corps, et cela depuis midi et demi, avec l’appui de 108 bouches à feu. Le front était inférieur à 2 600 mètres.

A 5 heures et demie, tous les efforts ont échoué. Le roi de Prusse fait encore venir à Gravelotte le 2e corps, qui se massait aux environs de Rezonville.

A 7 heures du soir, pour la troisième fois de la journée, l’attaque à fond est ordonnée. Une division toute fraîche du 2e corps est en tête. Le front d’attaque n’a pas en ce moment