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LE
MÉCANISME DE LA VIE MODERNE

LE THÉÂTRE

II.[1]
LA MISE EN SCÈNE ET LES ARTISTES


I

Le théâtre a ceci de supérieur aux autres genres littéraires ou artistiques, qu’il occupe et conquiert à la fois l’esprit et les sens ; il a ceci d’inférieur, qu’il est contraint, pour agir sur la masse à qui il s’adresse, de lui peindre, en les outrant suivant les besoins d’un moule conventionnel, des sentimens et des mœurs dont le propre est de changer sans cesse. Si les chefs-d’œuvre scéniques du passé ont beaucoup plus de lecteurs que d’auditeurs, s’ils sont plus imprimés que joués, c’est qu’on eux la « forme, » la « pièce de théâtre » est morte, et qu’il y demeure seulement les idées et le style qui remuent l’âme de tous les temps. C’est un vin qui ne pétille plus, qui ne grise plus, mais qui conserve son délicat arôme.

Si toutefois le succès de telle œuvre égale le désenchantement que cause sa reprise, et si la renommée durable d’une pièce ne dépend pas de son effet représentatif, dont la postérité fait

  1. Voyez la Revue du 15 juin.