suite, insupportables avec leurs observations, et anima les travailleurs par de bonnes paroles. On les aidait du dedans. A la longue, les deux planches du milieu cédèrent. Mademoiselle s’approcha : « Comme il y avait beaucoup de crotte, un valet de pied me prit, et me porta et me fourra par ce trou, où je n’eus pas sitôt la tête passée, que l’on battit le tambour… Les cris de Vive le roi, les princes, et point de Mazarin ! redoublèrent. Deux hommes me prirent et nie mirent sur une chaise de bois. Je ne sais si je fus assise dedans ou sur le bras, tant la joie où j’étais m’avait mise hors de moi-même : tout le monde me baisait les mains, et je me pâmais de rire de me voir en si plaisant état. »
On l’emporta en triomphe. Une compagnie de soldats marchait en tête, tambour battant, et faisait faire place. Mme de Fiesque et Mme de Frontenac pataugeaient par derrière dans la boue, entourées de gens du peuple qui ne se lassaient pas de baisotter et de caresser ces officiers d’une nouvelle espèce. On en fit une chanson :
- Deux jeunes et belles comtesses,
- Ses deux maréchales de camp,
- Suivirent sa royale altesse,
- Dont on faisait un grand cancan.
- Fiesque, cette bonne comtesse,
- Allait baisant les bateliers ;
- Et Frontenac (quelle détresse ! )
- Y perdit un de ses souliers.
A mi-chemin de l’Hôtel de ville, le cortège rencontra les autorités, la tête basse et ne sachant quelle figure faire. Mademoiselle fit semblant de croire qu’elles étaient en route pour lui ouvrir, écouta les discours officiels, rendit les révérences, et termina cette belle journée par l’envoi à Paris d’une dépêche triomphante. Son état-major l’avait rejointe, très penaud de ne pas avoir pris Orléans avec elle. Quant à l’armée, les Orléanais étaient décidés’ à ne pas la laisser entrer, et il fallut en passer par là.
Le jour suivant, à sept heures du matin, Mademoiselle eut le plaisir de narguer du haut d’une tourelle « quantité de gens de la cour, » de sa connaissance, qui arrivaient, — trop tard, — pour s’emparer de la ville. Le peuple les raillait. Ce fut un