Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 4.djvu/26

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

répondis à Seydoux, Kolb-Bernard, Jérôme David. Je raillai la conversion subite de Jérôme David au droit de réunion, faisant pendant à celle de Jules Simon au droit commun : « Le droit de réunion, à moins d’en faire un privilège au profit des ouvriers, ce qui serait criant, ne peut être établi que par une loi générale ; il n’entre pas dans le cadre restreint d’une loi pénale sur les coalitions et la liberté du travail. Que, dans la discussion de l’Adresse, l’honorable M. Jérôme David, qui ne l’a pas fait jusqu’à présent, présente un amendement en faveur du droit de réunion et du droit d’association, je le soutiendrai sans épigramme et de bon cœur ; jusque-là, qu’il nous permette de trouver que son argument est trop de circonstance. Il est mal de refuser un projet sous prétexte qu’il est incomplet. Oh ! je connais cette théorie, et je l’ai vue décrite dans les Mémoires de Mallet du Pan. C’est la théorie du pessimisme : elle consiste, lorsqu’un gouvernement déplaît en principe, au lieu, comme il convient à tout homme d’honneur et de bon sens, d’approuver ce qui est bien et de blâmer ce qui est mal, elle consiste à tout critiquer, à tout attaquer, surtout le bien, parce que le bien pourrait profiter à ceux qui l’accomplissent. (Marques d’adhésion.) Ainsi agissaient les émigrés, lorsque, au lieu de rester dans le pays, de se rendre aux assemblées, aux sections, pour empêcher la domination des mauvais, ils allaient à l’étranger, espérant faciliter un triomphe qui, par ses exagérations, devait amener leur succès. Ainsi ont trop souvent agi les partis qui se sont succédé parmi nous. Aussi, que reste-t-il dans notre pays, après tant d’agitations ? Beaucoup de ruines, de beaux et grands discours, et pas d’institutions libérales ; et tous, à quelque passé que nous appartenions, nous sommes contraints de regretter souvent de n’avoir pas soutenu les hommes de bonne volonté qui, dans un temps, s’appelaient Roland, dans un autre, Martignac, plus tard s’appelleront de tout autre nom, de n’avoir pas accepté les réformes partielles qu’ils nous offraient, et d’avoir trop sacrifié à l’implacable satisfaction de nos rancunes personnelles. (Vive approbation.) Je n’appartiens pas à cette école ; je ne suis pas pessimiste ; je prends le bien de quelque main qu’il me vienne ; je ne dis jamais : « Tout ou rien, » maxime factieuse. Je dis : « Un peu chaque jour ; à chaque jour suffit sa peine. » Aujourd’hui la loi des coalitions, demain celle des associations. Et, puisque l’honorable M. Jérôme David me le