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n’en ont plus que trois. On arrivera vite au dénouement, et quel sera-t-il ?

Le parti radical, en 1898, avait promis au pays des réformes presque magiques dont aucune peut-être n’a été faite : l’impôt sur le revenu, par exemple, a été éliminé par la commission du budget de la Chambre, après les hésitations et les contradictions que nous avons racontées. Le résultat de la législature risque de se solder à zéro. Beaucoup de personnes croient que le gouvernement a cherché à amuser le tapis parlementaire avec la loi sur les associations : il y a vu un moyen d’écarter d’autres discussions qui auraient peut-être disloqué sa majorité, que celle-là consolidait. Mais elle ne pouvait le faire qu’en donnant des espérances aux partis les plus avancés, à ceux qui perdent la tête lorsqu’ils aperçoivent le surplis d’un curé ou la robe d’un moine, et ces partis exigeront des faits à la suite des paroles. C’est là ce qui nous inquiète sur l’application de cette loi que M. Waldeck-Rousseau a eu la hardiesse d’appeler une loi d’apaisement, tout en ajoutant qu’il était prudent d’abréger les délais quelle comporte afin d’éviter une dangereuse agitation. Peut-être aurait-il pu rester maître de ses déterminations futures s’il avait revendiqué ou accepté, comme le proposaient M. Rambaud et l’auteur même de cette chronique, le droit d’autoriser les congrégations par décret. Mais il a insisté pour qu’il fallût une loi. Ce sont les Chambres qui accorderont ou qui refuseront les reconnaissances d’utilité publique. Les Chambres, on sait de quel esprit elles sont actuellement animées et quelles passions les agitent ! M. Waldeck-Rousseau a dit qu’il leur « recommanderait » un certain nombre de demandes : il est à craindre que ces recommandations ne soient pas suivies de beaucoup d’effet, et les congrégations auraient tort d’y trop compter. Néanmoins, si nous avions un conseil à leur donner, ce serait de solliciter quand même l’autorisation que la loi nouvelle rend obligatoire. Si on la refuse |à toutes, leur situation ne sera pas empirée et le résultat mettra en plein relief l’intolérance des pouvoirs publics. Si, au contraire, on l’accorde à quelques-unes, ce sera tant mieux. M. Waldeck-Rousseau a annoncé au Sénat qu’il avait déjà reçu un certain nombre de demandes. Cet empressement étonne, puisque la loi n’est pas encore promulguée ; mais il est de bon augure. Bien imprudent serait d’ailleurs celui qui voudrait prédire dès aujourd’hui comment la loi sera exécutée. Trop d’élémens restent obscurs dans ce problème : l’expérience seule pourra nous éclairer.

La thèse de la droite, soutenue avec beaucoup de force et de talent