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j’allai donner à Picard, que je n’avais pas revu, lecture de la partie relative au droit commun. Il me fit quelques observations dont je profitai. L’impression achevée, je lui envoyai ainsi qu’à Jules Favre une épreuve.

Jules Favre me répondit : « Mon cher ami, je viens de terminer la lecture de votre rapport, que je trouve très remarquable, quoique peut-être un peu trop savant. Il ne m’a pas converti, mais je suis sûr que la discussion ne fera, en établissant notre commune indépendance, que fortifier notre étroite alliance pour la défense de la liberté. Merci de votre affectueuse communication et mille amitiés sincères. » (19 avril 1864.)

Picard m’écrivit : « Mon cher ami, j’ai lu avec autant d’attention que d’intérêt ; vous pouvez dire : exegi monumentum. Sur quelques points de vos théories économiques, je ne pourrai complètement m’associer à vous, mais je n’ai cependant aucune observation utile à vous faire. Quant au côté juridique, votre opinion me semble aussi nettement soutenue que possible, sauf pour l’article des interdictions. Si vous ne ramenez pas vos lecteurs, ils ne pourront du moins vous accuser de les tromper. Je vous signale une expression qui m’a un peu choqué, celle de roman historique, adressée aux anciennes corporations ; également vos reproches à la Révolution française, à laquelle vous faites supporter l’erreur de quelques-uns de ceux qui la dirigeaient. Du reste, je termine à peine ma lecture et il faudrait une étude assez méditative, pour pouvoir critiquer, s’il y avait lieu de le faire. Je me borne donc à vous féliciter. A vous. »

J’envoyai également, sur la demande de Chevandier, une épreuve à Rouher et à Baroche. Le premier ne fit aucune objection ; le second se plaignit que le nom de l’Empereur ne fût jamais prononcé et que la loi parût être d’initiative parlementaire.

Dans la commission, le rapport rencontra quelques difficultés. Tant que j’en lus la partie générale ou celle consacrée aux argumens contre les coalitions, ce ne furent qu’éloges, applaudissemens. Les argumens en faveur provoquèrent au contraire d’interminables objections de la part de quelques membres : « Il faut réfléchir, remettons à demain, etc., » prétextes pour ajourner la loi, dont on ne voulait pas. Je me fâchai et déclarai que c’était à prendre ou à laisser, que, si mon rapport n’était pas adopté tel quel, sauf des modifications de détail dont j’étais prêt à tenir