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le remplace volume pour volume. La mort est presque foudroyante. Un chien ne résiste pas plus de vingt minutes à l’action de l’air qui contient un centième du gaz toxique.

Avec les doses faibles, il n’en est plus de même. Ou, pour mieux dire, lorsque la quantité et la tension du gaz diminuent par rapport à celles de l’oxygène, il s’établit un équilibre chimique entre eux et l’hémoglobine. C’est là un point qui n’a pas été assez remarqué : l’oxygène peut exercer une influence considérable sur les effets de l’oxyde de carbone, lorsque sa quantité et sa pression augmentent notablement par rapport à l’autre gaz. On avait eu tort de croire que, si l’oxyde de carbone peut chasser du sang l’oxygène, celui-ci est incapable de lui rendre la pareille. Il le peut, s’il est en forte majorité. C’est ce qu’avaient déjà entrevu Donders et Podolynski en 1872, et Claude Bernard lui-même.

L’oxyde de carbone ne reste pas indéfiniment fixé au sang : il disparaît ; il rend la place à l’oxygène ; le malade se rétablit. Les inhalations d’oxygène se justifiaient donc en théorie, dans les cas où la dose toxique était faible et la marche de l’intoxication lente. C’était la méthode thérapeutique universellement préconisée.

C’est ce procédé, renforcé par l’emploi de l’oxygène comprimé, que M. Mosso, le savant physiologiste italien, vient de remettre en lumière. Il a pu rappeler à la vie des animaux, chez lesquels la respiration avait cessé et le cœur s’était arrêté sous l’action de doses faibles. D’autre part, consulté par le ministre des Travaux publics d’Italie, sur les moyens de mettre un terme aux accidens qui frappaient, dans les longs tunnels alpins, les mécaniciens, les chauffeurs et les serre-freins, le savant biologiste a préconisé l’injection de l’oxygène comprimé dans le foyer de la machine pour supprimer entièrement les gaz et la fumée. Les employés des trains, qui, particulièrement sur la ligne des Giovi entre Gênes et Ronco, étaient sujets à des vertiges, des aberrations sensorielles et des syncopes, sont désormais, grâce à ces moyens, à l’abri de tout accident.

A. Dastre.