Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 3.djvu/233

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
227
LES FUMÉES ET LES GAZ DE L’ATMOSPHÈRE.

table pour l’homme et les animaux qui l’entourent. Il donne lieu à des accidens continuels. Il est l’agent de la mort par le charbon, c’est-à-dire par les émanations des réchauds, des poêles, des fourneaux, des calorifères, des fours à chaux et des foyers d’incendie. À dose trop faible pour tuer, il engendre des désordres morbides, souvent méconnus dans leur cause, qui portent sur tous les appareils de l’économie et particulièrement sur le système nerveux : ce sont les caractères des anémies graves.

Et maintenant, demandons-nous, avec M. A. Gautier, si les faibles proportions qui en existent dans les atmosphères urbaines, — en dehors, bien entendu, des foyers d’émanations directs, — sont réellement malfaisantes.

Il n’est pas douteux que l’action prolongée ou répétée des petites doses n’ait des suites fâcheuses. Les maux de tête, les vomissemens, les vertiges, les accidens d’anémie cérébrale, les névrites sont des symptômes communs chez tous ceux qui s’exposent aux émanations oxycarboniques. Si l’animal respire un air contenant seulement un millième du gaz toxique, la moitié de son sang perd, en une demi-heure, son oxygène, et devient ainsi inutile aux tissus. Avec des doses plus faibles, l’absorption est moindre et cesse bientôt de faire des progrès. Elle est cependant sensible encore avec le mélange au vingt-millième.

Si la ventilation est mauvaise, on a remarqué que l’effet toxique s’aggrave. « Je ne serais pas surpris, écrit M. de Saint-Martin, que la présence de quelques dix-millièmes d’oxyde de carbone suffise à rendre mortelle une atmosphère confinée, pour un homme y passant plusieurs heures endormi. » On connaît l’anémie des cuisiniers, des chauffeurs, des repasseuses, des ouvriers qui travaillent au-dessus d’un fourneau, des petits ménages qui cuisinent sur des poêles de fonte, des cochers qui dorment dans leur voiture sans en enlever la chaufferette, des manœuvres qui déchargent les fours à plâtre, de toute la multitude des personnes qui séjournent dans une chambre à feu mal ventilée.

Il faut distinguer, à tous égards, les doses fortes des doses faibles.

Pour les doses fortes, — et une dose supérieure à 1 p. 1000 est une dose forte, — c’est la loi de Claude Bernard qui prévaut. L’oxyde de carbone s’accumule dans le sang : il arrive à en chasser complètement, totalement et rapidement l’oxygène : il