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LES FUMÉES ET LES GAZ DE L’ATMOSPHÈRE.

Un chauffage mixte, d’après ces données, fournirait en moyenne 5 milligrammes de matériaux solides fumeux par kilogramme de combustible.

On sait, d’autre part, quelle est la consommation annuelle de charbon à Paris. On se la représentera par l’image suivante : Supposons que toute la provision de combustible destinée à être brûlée dans l’année soit régulièrement étalée sur la surface qu’occupe la ville. Il y aurait, dans cette hypothèse, 37 kilos de charbon sur chaque mètre de surface. Et, ainsi, chaque mètre superficiel rejetterait, dans l’année, 2 grammes de suie dans l’atmosphère ; ou, par jour, 0gr,00548, — La proportion serait doublée dans les villes comme Londres ou Manchester, qui font un usage presque exclusif de la houille. Cette quantité de matériaux ténus, diluée dans la masse atmosphérique qui enveloppe la ville, y devient imperceptible. Elle suffit pourtant à l’embrumer.

Si l’on recueille la fumée au moment où elle sort de l’évent de la cheminée, on la trouve composée, en proportions presque égales, de deux espèces de matériaux : les uns organiques, les autres minéraux. Ceux-ci sont formés d’une poussière fine de sulfates, phosphates, carbonates, silicates, alcalins ou alcalino-terreux. Les substances organiques sont des particules goudronneuses, pâteuses, adhésives, d’hydrocarbures solides, mélangées à du charbon très divisé.

M. A. Gautier, à qui nous empruntons la plupart de ces renseignemens, fait observer que la suppression des fumées visibles, qui comblerait les vœux du public, ne satisferait point encore les hygiénistes. Les gaz délétères, compagnons habituels de ces dégagemens fumeux, présentent, quoique invisibles, de plus graves inconvéniens. Ce ne serait point rendre un service suffisant à la santé publique que d’écarter la suie et le charbon en laissant subsister des corps tels que l’oxyde de carbone et l’acide cyanhydrique, toxiques aux doses les plus minimes ; ou des substances comme l’acide carbonique, nocives à des doses plus élevées ; ou, enfin, des agens corrosifs, comme l’acide sulfureux et l’acide sulfurique, capables de dégrader les toitures sur lesquelles les pluies et les brouillards les rabattent, d’attaquer les revêtemens métalliques, de déliter les pierres et les marbres qui forment l’ornement de la cité. Il ne faut pas perdre de vue, en effet, que le fonctionnement des foyers industriels et domestiques, à Paris seulement, déverse chaque jour, dans l’atmo-