Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 2.djvu/959

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

programme sur lequel les puissances se sont mises et sont restées d’accord ; toutefois, dans l’exécution de ce programme, il y a eu inévitablement des points à préciser, et l’œuvre n’a pas été toujours très facile. Eh veut-on un exemple ? La question de l’indemnité que la Chine doit payer aux puissances nous le fournira. Cette question est double. Il faut d’abord savoir à quel chiffre s’élèvera l’indemnité globale, suivant le mot à la mode, et, pour cela, fixer les réclamations particulières, et ensuite en faire le total. Mais si ce total est supérieur à ce qu’on a appelé les possibilités de la Chine, que faire ? Réduira-t-on proportionnellement les prétentions de chacun ? C’est inciter tout le monde à en émettre de plus considérables, en vue de la réduction qu’elles doivent subir. Procédera-t-on autrement, et réunira-t-on les représentans des puissances pour qu’ils discutent leurs chiffres respectifs autour d’un tapis vert, les comparent, et finalement se mettent d’accord sur le quantum auquel ils doivent être portés ou ramenés ? Cette manière de procéder n’est pas non plus sans inconvéniens, parce que les indemnités réclamées par telles ou telles puissances n’ont pas toujours la même origine, ni le même caractère. Enfin quelques-unes de ces puissances, qui ont eu déjà des rapports nombreux et anciens avec la Chine, ont aussi des traditions dont il ne leur convient pas de se départir, mais qu’elles ne peuvent pas imposer aux autres. On voit combien de questions préalables doivent être résolues avant que nous soyons en état d’énoncer devant la Chine le chiffre de nos exigences. Mais, cela fait, on n’aura pas encore atteint le but : il restera à déterminer à quelles ressources la Chine devra puiser pour faire face à ses obligations nouvelles. Tout se réduira évidemment à des augmentations d’impôts, mais de quels impôts ? M. le comte de Bulow, dans un discours au Reichstag, a dit formellement que c’est aux douanes qu’on s’adresserait, et cela nous a paru d’autant plus légitime que les droits d’entrée en Chine ne sont pas très élevés. Ils le sont beaucoup moins que dans la plupart des pays d’Europe et d’Amérique. Le surélèvement des tarifs de douane n’aurait donc rien que de naturel. Mais l’Angleterre y fait des objections ; d’autres projets ont été mis en avant, et on a bientôt pu s’apercevoir que le chancelier allemand était allé un peu vite en parlant d’un accord qui n’était pas encore établi. Il serait facile de citer d’autres articles du programme des puissances, accepté par la Chine, qui ne paraissent plus aussi simples lorsqu’il s’agit de les exécuter. Les gardes à maintenir à Pékin, pour assurer la sécurité des Légations après les dangers qu’elles ont courus, soulèvent des difficultés auxquelles il fallait d’ailleurs bien s’attendre. La diplomatie