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et de l’élevage. Le Kaffa est la patrie d’origine du café ; il y pousse à l’état sauvage ; au Harrar, il est cultivé et peut rivaliser avec les meilleurs « mokas » d’Arabie. On compte que, dès l’ouverture du chemin de fer, 10 à 15 000 tonnes de café descendront annuellement vers Djibouti[1]. La cire, abondante dans un pays dont la boisson nationale est l’hydromel, les peaux, dépouilles des bœufs, chèvres et moutons que nourrissent en grande quantité les gras pâturages des plateaux et de la montagne, sont deux articles importons de l’exportation éthiopienne[2]. Les légumes frais et les fruits du Harrar, la viande des troupeaux du Choa ne sauraient manquer, quand le chemin de fer les transport (ira rapidement vers la mer, de trouver, sur la côte brûlée d’Aden, sur les paquebots de passage et à Djibouti même, une vente toujours assurée. De même pour le blé : il rencontre sur les plateaux des conditions favorables à sa végétation, mais il y est à peine cultivé et ne se vend que 3 francs les 100 kilogrammes sur les marchés du centre ; tout changera sans doute avec la possibilité de l’exportation. Ajoutons enfin l’ivoire, dont Harrar expédie vers la côte environ 800 tonnes par an. De tous ces produits, le chemin de fer transportera, on a le droit de l’espérer, 13 000 tonnes dès sa première année.

L’importation est encore paralysée par l’extrême cherté des moyens de transport : elle consiste surtout en sel[3] et en objets fabriqués venus d’Europe ; elle atteint, en moyenne, 4 000 tonnes par an. L’industrie indigène est aussi rudimentaire que possible, mais la population a le goût du luxe, des riches vêtemens, des belles armes, des parfums. Des besoins nouveaux naîtront de la facilité même de les satisfaire ; les Ethiopiens demanderont, de plus en plus, les produits manufacturés européens. Il y aura là, pour la France, un marché à conquérir et, pour le chemin de fer, un bénéfice assuré. L’ouverture de la ligne du Harrar sera pour Djibouti le signal d’un brillant essor, pour peu que

  1. Pour les chiffres de l’importation et de l’exportation de l’Ethiopie, voyez le dernier Rapport de M. Rennel Rodd, Animal series, no 1978 (1897), et le Rapport de M. Ries, conseiller du commerce extérieur à Aden (Moniteur officiel du Commerce, février 1899).
  2. Exportation de 1895 : 575 000 peaux de chèvres ou de moutons, 72 000 peaux de bœufs, soit 500 tonnes.
  3. La Compagnie impériale des chemins de fer éthiopiens a obtenu la concession de l’exploitation des sels du lac Assal, près de Djibouti ; elle aura dans ce produit un article d’importation toujours recherché en Ethiopie ; on estime que ce seul produit donne lieu à un mouvement d’affaires annuel de 9 millions de francs.