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Quand en effet l’homme aura accompli son devoir, commencera celui de la femme. Formée par cette éducation, elle ne sera pas seulement capable de garder une fidélité passive aux croyances chrétiennes, elle sera redevenue apte à les défendre.

Si la philosophie lui a mesuré les solidités de la foi et les fragilités du doute ; si la morale lui a montré, dans les faits désordonnés, vils, menaçans pour l’avenir, les suites nécessaires des idées fausses ; si l’histoire lui a raconté la solidarité séculaire de la France et du catholicisme ; si la connaissance des peuples contemporains et du monde moderne lui a appris que l’apostolat catholique perpétue encore dans l’univers l’influence française, à travers les éclipses de la gloire, l’amoindrissement de la population et les pertes subies par le travail national sur les marchés du monde, la femme ne doit pas garder ces certitudes pour elle. Ses calomniateurs ont prétendu que garder un secret lui était lourd : qu’elle se décharge de celui-là. Qu’elle rende à l’homme bienfait pour bienfait en employant la science qu’elle lui devra à lui rappeler la vérité.

Elle peut influer sur l’homme sans faire l’homme. Il ne s’agit pas de revendiquer son tour de parole aux tribunes politiques, ou d’attendre que sa volonté ait un poids légal dans les scrutins. Peu importe que, le jour où, tous les quatre ans, la souveraineté de l’homme consiste à choisir ses maîtres, la voix de la femme ne compte pas, si elle a tous les autres jours pour préparer, améliorer, changer l’opinion de l’homme. Il suffit d’une loi et d’un despote pour dépouiller l’homme de son suffrage politique : aucune loi, aucune tyrannie ne saurait atteindre l’empire de la femme dans la famille et dans la société. Dans la famille, elle ne fera pas seulement l’union des tendresses, elle travaillera à l’union des croyances ; son empire sur les cœurs lui rendra facile l’accès auprès des intelligences quand son mari et ses enfans sauront sa pensée nourrie par l’étude, exigeante sur les preuves, capable de réfuter les raisons de mots par des mots de raison. Cette constante usure des fanatismes, des indifférences, des doutes masculins sur la patience ferme et la douceur persuasive d’un christianisme toujours occupé à obtenir non seulement la tolérance, mais l’adhésion, sera l’œuvre de la femme au foyer. Les femmes ont cette influence à étendre dans la société. Elles y sont reines, leur dit-on : pour les souverains véritables, régner c’est gouverner. Trop longtemps ce pouvoir s’est surtout exercé