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III

Le caoutchouc et la gutta-percha ont une origine analogue ; ils proviennent des sucs laiteux ou latex de certaines plantes exotiques. Et cette comparaison avec le lait, qui est impliquée par le nom donné au liquide et inspirée par son aspect au moment où il s’échappe du végétal incisé, offre l’avantage de fixer dans l’esprit quelques notions exactes relativement à la nature de cette production.

Le lait, en effet, est une sécrétion ; et il ne viendra à l’idée de personne de le confondre avec le sang de l’animal. On sait bien qu’il s’agit d’un liquide produit dans un appareil sécréteur spécial. De même, le latex du caoutchoutier ou du guttier ne doit pas être confondu avec la sève du végétal, bien que l’opinion vulgaire ait quelque propension à commettre cette confusion, et que quelques savans, comme Schultz, A. de Jussieu, Decaisne et Naudin, l’aient commise délibérément. Le suc laiteux n’est pas un liquide circulant, c’est un produit de sécrétion. Il est engendré dans des cellules spéciales, qui prennent le plus souvent la forme de longs tubes glandulaires : les vaisseaux laticifères. En principe, ces tubes, plus ou moins ramifiés, ne s’anastomosent pas plus entre eux que les branches des glandes titulaires, si communes chez les animaux ; et l’on sait que le rein offre, en effet, la seule exception à cette règle.

Ces vaisseaux laticifères, d’un diamètre très faible, microscopique, mais d’une grande longueur, sont souvent cloisonnés, c’est-à-dire formés d’articles cellulaires disposés bout à bout, en files. C’est ce qui arrive dans le pavot et chez beaucoup d’autres plantés, campanules, lobélies, Aroïdées, Musacées ; et c’est aussi ce qui existe chez les Sapotacées qui produisent précisément la gutta-percha. La conséquence de celle disposition est que ces laticifères articulés, lorsqu’ils viennent à être blessés en un point, ne laissent écouler que la faible portion du suc laiteux contenue dans les segmens atteints. Le latex, gutta-percha est difficile à recueillir : il faut, pour l’obtenir en quantité appréciable, multiplier les incisions, broyer les tissus, écraser les écorces.

D’autres fois, — et c’est la seconde alternative, — les laticifères ne présentent pas de cloisonnement ; ils ne semblent pas formés de segmens juxtaposés et distincts. Ils sont d’une seule