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de leur genre et que, probablement, on ne me pardonnera pas. »

Le 10 janvier, dans une autre lettre à son ami, il confirmait : « Je ne compte pas être chargé de recommencer les hostilités. J’ai demandé déjà six fois mon remplacement. Je le désire de plus en plus et je ne cesserai pas mes instances à cet égard. La légèreté et l’injustice avec lesquelles j’ai vu traiter le militaire qui n’est pas toujours heureux ont fait naître en moi un sentiment qu’il me sera difficile de vaincre : le dégoût. Quoi qu’il en soit, il n’altérera jamais l’amitié que je t’ai vouée. Je t’embrasse. » Cette résolution de se retirer ne l’empêchait pas de s’occuper avec sollicitude de ses troupes. À cette même date, l’armistice désapprouvé dans la forme, ayant été ratifié quant au fond, il entreprenait l’œuvre difficile de leur cantonnement : « Je ne laisserai sur notre ligne, dont la droite est en avant de Germersheim sur Lenguenfeld et la gauche à Hombourg, qu’un léger cordon. L’armée de Sambre-et-Meuse laisse vingt mille hommes dans le Hundsruck et s’établit du reste dans les cantonnemens du pays de Juliers. Son cordon du Hunsdruck appuie sa gauche à Baccharach, son centre sur la Nahe, à Kirn, et sa droite à Saint-Vendel, en remontant cette rivière. »

III

Au cours de la campagne, pendant que Pichegru déployait les soins et les sollicitudes dont témoignent les nombreux documens que nous avons cités, les émissaires avaient continué à s’agiter pour prouver à Condé que le général était dans leurs mains, et que, si peu conformes que fussent ses opérations aux plans et aux engagemens qu’ils lui attribuaient dès le mois d’août, il n’en poursuivait pas moins le grand résultat auquel il avait promis de concourir. D’autres acteurs engagés par eux étaient entrés en scène : Demougé, Wittersbach et la baronne de Reich, le premier résidant à Strasbourg, les deux autres en terre allemande, et tous trois enrôlés comme espions au service de l’Autriche. C’est Fauche-Borel qui avait entraîné Demougé dans l’affaire, et celui-ci s’était empressé d’y introduire ses deux acolytes. Entre tous ces personnages, il y avait partie liée pour tirer des fonds des Anglais, par l’intermédiaire de Condé et à sa recommandation.

Au quartier général de Pichegru, à en croire une