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Angleterre (car la philanthropie peut, comme tout autre emploi de notre activité, devenir affaire de mode), est la profession de nurse ou d’infirmière. Il y a longtemps que Florence Nightingale, cette infirmière modèle qui joua un si grand rôle auprès des blessés dans la guerre de Crimée, a dit : « Soigner les malades est un art, c’est même un des beaux-arts, et il ne souffre pas la médiocrité ; on ne saurait soigner en amateur. » Certes elle ne pouvait désirer un enseignement plus complet que celui qui est donné aujourd’hui à ses émules. Aux Etats-Unis, les nurses ne font pas moins de trois années d’études à l’hôpital. Première année : la salle, avec leçons d’anatomie et de physiologie ; seconde année : la cuisine, rudimens de chimie, étude scientifique de l’effet et de la valeur des alimens ; troisième année : leçons aux débutantes, étude d’une langue étrangère, etc. Examen final au bout de trois ans. L’association des infirmières diplômées procure aussi des gardes à domicile ; elle est vraiment composée de femmes d’élite, ayant à cœur la dignité de leur profession. Dans les pays catholiques, tels que le Canada, les religieuses ont et auront probablement toujours la préférence ; mais, au Canada même, dans l’Ouest surtout, l’ordre des infirmières ambulantes, organisé par lady Aberdeen, a cependant trouvé place. En effet le Canada ne se borne pas à la vaste province française de Québec ; il s’étend sur d’immenses espaces qui n’ont en tout que cinq à six millions d’habitans. Le pionnier qui défriche des terres loin du moindre village ne peut guère appeler de médecin en cas de maladie ; il lui est même difficile de s’assurer les soins d’une servante. La nurse du district apparaît alors comme une providence. Les centres de l’ordre auxquels on peut la demander sont plantés de distance en distance, chacun d’eux ayant à sa tête une surintendante. Il faut, pour être admise au rang d’infirmière Victorienne, avoir d’abord le diplôme d’une école attachée à quelque hôpital en renom et ensuite avoir fait l’apprentissage de la carrière d’ambulance, tout en apprenant à soigner les pauvres et en se renseignant sur les mœurs et habitudes du pays. La bicyclette est d’un grand secours pour circuler pendant la saison d’été ; l’hiver, la neige oblige à d’autres moyens de locomotion. Dans deux localités les Victoriennes ont de petits hôpitaux où sont reçus les laboureurs des fermes et des ranches. Elles vont jusqu’au Klondyke. Leurs services n’ont pas été superflus durant une terrible épidémie de fièvre typhoïde. Ainsi, nous dit-on, les