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autres à l’immobilité. Ces cabinets sont généralement transitoires. Après le général Pelloux, qui avait trop entrepris et pas assez réussi, peut-être y avait-il lieu d’en composer un sur ce format. On l’a fait ; de douloureux événemens se sont produits ; la Chambre a été souvent en vacances ; le cabinet a duré plus qu’on ne pouvait l’espérer. Ministère de coalition, il a succombé finalement sous la plus formidable coalition qu’on eût encore vue. La droite, vers laquelle il avait incliné, ne l’a même pas défendu, et, si le fidèle marquis di Rudini ne lui avait pas donné l’appoint des quelques voix dont il dispose, il aurait risqué d’avoir contre lui l’unanimité de la Chambre. M. Saracco n’avait pas mérité un aussi triste sort. L’affaire de la Chambre du travail de Gênes, fermée pendant la dernière grève, a été terriblement exploitée contre lui ; mais elle n’a servi que de prétexte. En réalité, aucun des hommes les plus importans de la Chambre ne faisait partie du gouvernement, et ils étaient tous pressés d’y prendre place. Toutefois, même au cours de l’assaut qu’ils ont livré ensemble, ils ont laissé voir plus de jalousie encore les uns envers les autres que de malveillance commune contre M. Saracco. C’est au point que, le lendemain de la chute de celui-ci, et malgré le poids de la majorité qui l’avait écrasé, les journaux ne regardaient pas comme impossible qu’il fût chargé de départager les vainqueurs et de procéder lui-même à la composition du futur cabinet. Même aujourd’hui, certaines gens se demandent si on ne finira pas par là. M. Sonnino, qui s’est montré un des plus ardens dans la lutte, a vu se dresser contre lui des préventions acharnées. M. Zanardelli, malade, n’assistait pas à la bataille : cela ne l’a pas empêché d’en recueillir les lauriers. C’est lui qu’après avoir entendu tout le monde, le Roi a fait définitivement appeler pour lui demander s’il consentirait à former un ministère. S’il y réussit, le cabinet sera surtout recruté dans la gauche et dans le centre. M. Zanardelli aurait pour principal lieutenant M. Giolitti ; on commence même à dire que, vu l’état de santé de son chef, M. Giolitti serait l’homme le plus actif de la combinaison. M. Prinetti aurait le portefeuille des Affaires étrangères : on ne s’attendait pas à voir M. Prinetti, qui est un des chefs de la droite, figurer dans un cabinet Zanardelli. Mais M. Zanardelli réussira-t-il ? Au moment où nous écrivons, la crise est toujours ouverte, et rien ne prouve qu’elle se dénoue si rapidement.


Nous ne pouvons laisser passer sans le signaler avec sympathie l’événement qui provoque une joie si vive dans toute la Hollande. On sait que la reine Wilhelmine a choisi pour époux le duc Henri de