Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 1.djvu/849

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


II. — L’INDUSTRIE

Dix séances du Congrès sont consacrées à l’industrie, dont presque toutes les branches s’ouvrent aujourd’hui aux femmes. La besogne traditionnelle du ménage s’étant considérablement allégée depuis le règne des machines, elles se sont précipitées vers les fabriques et vers les ateliers. Le sort de l’ouvrière est devenu par-là beaucoup plus dur que celui de l’ouvrier, ce travail du dehors ne pouvant être pour elle, comme il l’est pour lui, l’affaire principale. Les devoirs de famille, qu’elle soit fille, mariée ou veuve, pèsent sur elle d’une façon beaucoup plus compliquée. Veiller à ce qu’elle travaille dans de bonnes conditions hygiéniques et reçoive une rémunération suffisante, tel doit être le souci des femmes qui possèdent, des femmes qui savent ; on n’élèvera point le niveau moral de l’ouvrière avant d’avoir amélioré pour elle les conditions matérielles.

Le Congrès international procède donc à une investigation préliminaire.

Les renseignemens fournis sur la Russie sont lamentables. Ses ouvriers de fabriques ne forment pas encore une classe bien distincte. Beaucoup d’entre eux sont des agriculteurs, qui, l’hiver, exercent pour vivre un métier mal payé. Par exemple, les manufacturiers de la Russie centrale logent gratis leur personnel dans des baraques où l’on empile, autant d’individus, hommes, femmes et enfans qu’elles en peuvent contenir. Cependant cette affreuse misère commence à attirer l’attention. Une loi récente fixe pour les adultes à onze heures et demie le temps du travail, qui « ‘tait parfois de quinze ou dix-sept heures. On a pu voir aussi, à notre dernière Exposition, que les industries rurales sont patronnées par les princesses et les dames de la société, et que d’intéressans ouvroirs se fondent sous le patronage de l’Impératrice.

En Allemagne, le nombre des femmes engagées dans l’industrie est formidable. De 1882 à 1895, il a augmenté de 400 000, et l’effet de certains métiers sur la santé générale des mères a justement ému l’Etat, qui veut de beaux soldats pour le servir. Des lois spéciales ont donc été appliquées au travail des femmes mariées ; on est même allé trop loin, on a prétendu leur fermer les fabriques, et elles ont énergiquement protesté contre