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Les inventeurs ne se découragèrent point. En 1872, M. Caron entreprenait d’éclairer le boulevard des Italiens par le même procédé ; il substituait seulement le crayon de zircone aux bâtons de chaux et de magnésie, jusqu’alors en usage. Il utilisait ainsi, — après Tessié du Motay lui-même, — une ancienne observation de Berzélius, qui, en 1825, avait constaté que les oxydes de métaux rares, le zirconium et le cérium, chauffés au chalumeau, jetaient un très vif éclat. Une dernière tentative, tout aussi vaine, fut faite par M. Popp, qui essaya de remplacer l’oxygène par l’air comprimé circulant dans une canalisation qui doublait celle du gaz.

La question était définitivement jugée. Il n’y avait rien à tirer, industriellement parlant, du principe de l’incandescence des solides, appliqué à la manière de William Drummond, c’est-à-dire avec l’emploi de l’oxygène et la complication d’une double canalisation. C’est dans une autre direction qu’il fallait chercher.


III

La solution était beaucoup plus simple qu’on ne l’imaginait. De quoi s’agissait-il, en effet ? Il fallait obtenir une flamme de température très élevée et s’en servir pour porter à l’incandescence un corps solide approprié à ce rôle. Et, si la disposition adoptée ne fournissait pas la flamme la plus chaude qu’on puisse obtenir, il importerait peu, à la condition de choisir un corps réfractaire parfaitement apte à l’incandescence. Il y a là, en présence, deux facteurs, la chaleur de la flamme, la qualité du corps incandescent, qui peuvent se compenser. La première partie du programme était déjà réalisée. On savait produire des flammes chaudes sans qu’il fût nécessaire de recourir à la complication d’une double canalisation. Il existait, dans les laboratoires, un appareil d’une simplicité qui ne saurait être dépassée, et qui fournit une flamme très chaude ; c’est le brûleur Bunsen. Le gaz combustible et l’air y sont plus ou moins intimement mélangés avant d’être enflammés. La combustion s’y fait totale et rapide : la flamme est presque homogène, courte, pâle, légèrement bleuâtre et très chaude. Il n’y a donc pas eu autre chose à Cake que d’adapter ce 1res simple appareil aux conditions de la pratique courante, c’est-à-dire d’en régler les dimensions et les dispositions. Les soins attentifs de quelques constructeurs y ont suffi. Dans cette révolution industrielle, — et la substitution de l’éclairage à incandescence à l’éclairage ordinaire mérite